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2 sept. 2009

LES REGRETS

Pour la deuxième fois en moins d'un mois, Yvan Attal se retrouve au coeur d'une histoire d'adultère. Mais contrairement à Partir, où il était le mari défait, il est cette fois celui qui trompe, ne pouvant résister à des retrouvailles inattendues avec son grand amour de jeunesse. Dans Les regrets, il est question pour les amants de rattraper le temps perdu et de déterminer, ensemble ou individuellement, si les années passées depuis la première séparation sont un pur gâchis ou la condition nécessaire pour rendre la seconde fois plus intense. Cédric Kahn s'intéresse de très près à la mécanique des sentiments qui s'empare des deux héros, explorant plus en profondeur les tourments du personnage masculin, sans doute parce qu'on retranscrit mieux ce que l'on connaît soi-même. L'objectif est clair et annoncé : éviter toute dérive stylistique, qu'elle soit thématique ou visuelle, pour ne se consacrer qu'à l'essentiel, à savoir le ressenti, le vécu, l'interaction entre ces deux êtres.
En résulte un film très simple - mais pas laid - sur la forme, qui reste droit dans ses bottes et décrit à merveille la passion qui étreint les deux personnages. Une alchimie inexplicable, imprévisible, faite de coups de sang, de coups de folie, d'indécision et d'instabilité. Kahn dépeint la fragilité de la relation, fragilité dont les deux protagonistes ont conscience, mais qui ne les empêche pas de foncer tête baissée vers un avenir potentiellement partagé. Leur obstination teintée d'égoïsme fait plus peur qu'envie. Et l'on retrouve çà et là le Cédric Kahn de L'ennui, chef d'oeuvre sur le désir, la jalousie et l'attente.
Plus le film avance et plus le Mathieu Lievin des Regrets fait penser au Martin de L'ennui : ils semblent tous deux liés par une bestialité toujours à deux doigts de devenir de la folie furieuse. Possessifs et exclusifs, ils sont prêts à aller jusqu'au bout pour posséder la femme qui les hante. Le film monte en puissance et finit par devenir tétanisant lorsque les divergences s'installent entre les deux héros et créent un tumulte de plus en plus assourdissant. Gagnant en épaisseur avec les années, Yvan Attal est une nouvelle fois impressionnant et confirme son statut de grand parmi les grands. Forcément plus effacée, mais d'une intensité discrète, Valeria Bruni-Tedeschi est une partenaire idéale : excellente idée de casting que d'avoir choisi une femme plutôt ordinaire au lieu d'une quadra pétillante au charme immédiat et dévastateur, puisque la chimie amoureuse va bien au-delà de la simple apparence. Même s'il manque un rien d'ampleur pour être totalement prenant, Les regrets confirme en tout cas que Cédric Kahn, après un incident en forme d'Avion, fait toujours partie des cinéastes français qui comptent.




Les regrets de Cédric Kahn. 1h45. Sortie : 02/09/2009.
Critique publiée sur Écran Large.

24 déc. 2008

LOUISE-MICHEL

Faire buter un patron salaud avec ses indemnités de licenciement, c'est l'idée de Louise, qui engage un soi-disant tueur pour faire le boulot. Ce n'est que le début de Louise-Michel, troisième film du duo Delépine-Kervern, et sans nul doute celui qui possède le plus gros potentiel populaire. Parce qu'il raconte une histoire simple et méchante, rappelant certains reportages du Groland. Et parce que le noir et blanc n'est plus de mise, laissant place à une couleur un peu crasseuse rendant grâce aux paysages picards. Ah, Saint-Quentin, son bar à hôtesses, son palais de justice. Cette parenthèse régionale refermée, revenons donc au film.
Plus populaires donc, mais pas forcément plus percutants, les deux zozos du Groland livrent une comédie sociale souvent féroce, mais qui met en avant leurs difficultés à gérer le format long. Car Louise-Michel, à part quelques très bons gags assez inattendus, c'est un peu toujours la même chose. L'idée de faire finalement tuer le patron par une mourante a quelque chose de terrible, presque au-delà de l'humour noir, mais quand cela se répète plusieurs fois de suite, il est permis de faire la moue.
Idem pour le défilé de guests-stars, souvent inutiles, ne semblant être là que pour permettre aux réalisateurs de montrer qu'ils ont des relations, notamment à gauche. Benoît Poelvoorde est de loin le meilleur d'entre tous, en tordu reconstituant les attentats du 11 septembre. Hilarant. Tout comme Yolande Moreau et Bouli Lanners, de plus en plus à la mode (c'est compréhensible), et qui s'en donnent à coeur joie pour faire profiter au film de leurs physiques bien particuliers. Ils ne sont tout de même pas assez fortiches pour faire oublier le ratage de la fin de Louise-Michel, où Kervern et Delépine tentent à nouveau la carte du surréalisme, et se plantent encore plus que dans Avida. Heureusement que les deux compères ont longtemps fait du ridicule leur marque de fabrique : ça permet de faire ton sur ton.
Bref, s'ils sont évidemment plus drôles que la moyenne des humoristes francophones, ces deux-là ont encore des progrès à faire. Et pourquoi pas revenir au noir et blanc ? La platitude de la réalisation de Louise-Michel est peut-être volontaire (pour se concentrer davantage sur les acteurs et les situations), mais l'image quand même franchement laide. Même en noir et blanc, on aurait compris que les rues picardes et les usines désaffectées ont quelque chose de singulièrement laid. Ils ont l'envie, des sujets à gogo, et un vrai capital sympathie auprès du public : ne leur reste désormais qu'à apprendre la finesse.
6/10

11 juil. 2008

LE VOYAGE AUX PYRÉNÉES

Pour pénétrer l’univers de Jean-Marie et Arnaud Larrieu, il faut habituellement accepter que la gravité soit traitée avec loufoquerie et la loufoquerie avec gravité, dans une sorte d’équilibre à la fois primaire et subtil. Taratata : Le voyage aux Pyrénées, c’est du loufoque ascendant loufoque, cent minutes délirantes qui rebondissent régulièrement au gré de situations tellement improbables qu’elles finissent par devenir complètement absurdes. Un ton bizarre mais assumé de la part des frangins, qui s’offrent un fil mineur en forme de vacances dans cette région qu’ils chérissent tant.
Que les fans d’un cinéma français bien poli soient prévenus : Le voyage aux Pyrénées, c’est un trip auteuriste mais inconfortable, qui revendique ses moments les plus ridicules avec un aplomb déconcertant. On peut légitimement se lasser de la surenchère perpétuelle dans laquelle se lance le scénario, ainsi que de son absence totale de fil conducteur. On peut également regretter le temps où ce ton si particulier n’était pas le centre même des films des frères Larrieu. On nage en pleine fantaisie, et il semble difficile d’en tirer un quelconque enseignement ou d’en garder un petit morceau avec soi, comme c’est souvent le cas pour les films ayant un minimum d’épaisseur.
Mais voilà : on a beau trépigner, s’impatienter par endroits, Larrieu & Larrieu nous reconquièrent régulièrement grâce à quelques séquences irrésistibles ou à des détails savoureux auxquels on aime à s’accrocher. Tout cela ressemble furieusement à de l’écriture automatique, qu’on croise un faux ours, un tibétain amateur de champignons ou qu’on aille encore beaucoup plus loin dans l’étrange (dernier quart d’heure très très charmant ou très très agaçant, c’est selon). La fin est magnifique, confirmant le talent de monsieur Darroussin quel que soit le registre où il évolue, ainsi que celui de mademoiselle Azéma lorsqu’elle est bien dirigée (c’est-à-dire un peu bridée mais pas trop, érotisée mais pas hystérisée). On espère revoir ce beau duo le plus vite possible chez les Larrieu, de préférence dans une œuvre un peu plus consistante que celle-ci.
6/10

15 févr. 2008

CAPITAINE ACHAB

Difficile, lorsqu'on n'a pas lu Moby Dick, de repérer dans Capitaine Achab ce qui reste d'Herman Melville et ce qui naît de Philippe Ramos. Qu'importe : voici un film plein, rythmé, maîtrisé, que l'on imagine très respectueux du matériau de départ. Fasciné par l'oeuvre de Melville et surtout par le capitaine Achab, Ramos livre un portrait admirable car refusant toute psychologie et se méfiant cordialement de la poésie. Il offre un cinéma de l'épure, de l'humain, où chacun peut (et doit) se faire sa propre idée de chacun, simplement à partir de ses gestes et attitudes les plus ordinaires en apparence.
La construction en cinq chapitres clairement découpés, narrés en voix off par cinq des personnages que rencontre Achab sur son chemin, décuple la fascination éprouvée pour ce petit bonhomme déterminé, transformé trop vite en un marin torturé et malheureux. D'un chapitre à l'autre, on change totalement d'univers, et surtout de protagonistes, puisqu'à part Achab aucun n'apparaît pendant plus d'un chapitre. D'où cette narration chorale, faisant de ce héros maudit un mystère ambulant sur lequel tout le monde a un point de vue biaisé mais pas de vue d'ensemble. Le jeune Virgile Leclaire, puis l'incroyable Denis Lavant sont deux incarnations hors pair de cet homme si fascinant. La distribution, foisonnante et judicieusement choisie, est à l'unisson. Carlo Brandt et Jean-François Stévenin sont vraiment des acteurs trop rares.
La relative froideur du cinéma de Ramos trouve un peu ses limites vers la fin, lorsque le film se focalise (de façon pas trop appuyée) sur la relation d'Achab et Moby Dick. Là, le réalisateur pioche un peu, versant subitement dans la poésie qu'il avait violemment rejetée jusque là. D'où quelques courts moments au bord de l'onirisme, pas détestables en soi, mais qui auraient gagné à être davantage suggérés. Cela n'altère pas en tout cas la beauté de Capitaine Achab, voyage intérieur et solitaire au coeur d'un mythe ne demandant qu'à être exploré.
7/10
 
"Bienvenue au royaume du pisse-froid inculte qui est au cinéma ce que Philippe Manoeuvre est au rock" (© Trollman)
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