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15 févr. 2008

CAPITAINE ACHAB

Difficile, lorsqu'on n'a pas lu Moby Dick, de repérer dans Capitaine Achab ce qui reste d'Herman Melville et ce qui naît de Philippe Ramos. Qu'importe : voici un film plein, rythmé, maîtrisé, que l'on imagine très respectueux du matériau de départ. Fasciné par l'oeuvre de Melville et surtout par le capitaine Achab, Ramos livre un portrait admirable car refusant toute psychologie et se méfiant cordialement de la poésie. Il offre un cinéma de l'épure, de l'humain, où chacun peut (et doit) se faire sa propre idée de chacun, simplement à partir de ses gestes et attitudes les plus ordinaires en apparence.
La construction en cinq chapitres clairement découpés, narrés en voix off par cinq des personnages que rencontre Achab sur son chemin, décuple la fascination éprouvée pour ce petit bonhomme déterminé, transformé trop vite en un marin torturé et malheureux. D'un chapitre à l'autre, on change totalement d'univers, et surtout de protagonistes, puisqu'à part Achab aucun n'apparaît pendant plus d'un chapitre. D'où cette narration chorale, faisant de ce héros maudit un mystère ambulant sur lequel tout le monde a un point de vue biaisé mais pas de vue d'ensemble. Le jeune Virgile Leclaire, puis l'incroyable Denis Lavant sont deux incarnations hors pair de cet homme si fascinant. La distribution, foisonnante et judicieusement choisie, est à l'unisson. Carlo Brandt et Jean-François Stévenin sont vraiment des acteurs trop rares.
La relative froideur du cinéma de Ramos trouve un peu ses limites vers la fin, lorsque le film se focalise (de façon pas trop appuyée) sur la relation d'Achab et Moby Dick. Là, le réalisateur pioche un peu, versant subitement dans la poésie qu'il avait violemment rejetée jusque là. D'où quelques courts moments au bord de l'onirisme, pas détestables en soi, mais qui auraient gagné à être davantage suggérés. Cela n'altère pas en tout cas la beauté de Capitaine Achab, voyage intérieur et solitaire au coeur d'un mythe ne demandant qu'à être exploré.
7/10

10 déc. 2007

LA FRANCE

De la part de Serge Bozon, auteur de moyens métrages incongrus et élitistes, on n'attendait pas autre chose qu'un film en marge, refusant de jouer avec les codes traditionnels du cinéma. Avec La France, Bozon réussit quelques chose d'assez exceptionnel : faire exactement ce qu'on attendait de lui, tout en parvenant à surprendre son monde. La France ressemble à un film de guerre et à une comédie musicale, mais c'est plutôt vers le théâtre antique que le réalisateur et sa fidèle scénariste nous attirent irrémédiablement.
Antique mais pas que, puisque l'héroïne du film est une descendante du chevalier D'Eon, petit brin de femme dont le déguisement en homme ne trompe pas le spectateur mais dame le pion à ses compagnons. À partir de là, Bozon brode une épopée de poche, surréaliste et d'une tristesse infinie, à peine adoucie par les quelques chansons impromptues qui viennent bercer la marche des soldats. Les instruments apparaissent comme par magie, les gros durs se sentent pousser des ailes, et le drôle de rythme des compositions vient un temps nous tirer du spleen dans lequel nous étions plongés. Délicatement, puis de moins en moins, le film nous prend, nous captive, rebondit, nous inquiète (voir la terrifiante scène de la grange). Difficile de dire pourquoi, mais La France est un film qui séduit, et dont la façade auteuriste ne doit pas repousser, tant ce Bozon-là est accessible et universellement appréciable.
7/10
 
"Bienvenue au royaume du pisse-froid inculte qui est au cinéma ce que Philippe Manoeuvre est au rock" (© Trollman)
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