
Il faut quasiment une heure pour qu'enfin Lady Chatterley atteigne le coeur de son sujet : auparavant, Ferran aura brillamment tourné autour de son héroïne, jeune femme engoncée et corsetée, trop vite prise au piège d'une ennuyeuse vie bourgeoise aux côtés d'un mari paralysé des pattes arrières (bassin compris, si vous voyez ce que je veux dire). C'est cette vision de l'ennui qui constitue le plus beau du film. Ensuite, lorsque la jolie et frêle Constance Chatterley cède au désir de Parkin, grand bourru au physique ingrat, ce qui aurait dû être le plus saisissant est finalement le plus attendu. Au fil de scènes de sexe à la fois crues et très pudiques, Pascale Ferran montre la métamorphose progressive d'une histoire de chair en véritable histoire d'amour. C'est malheureusement trop schématique et systématique : lors du premier contact, le garde-chasse trombine la lady avec autant de grâce qu'un lapin en rut ; la deuxième fois, on sent poindre un peu plus de respect et d'écoute ; et ainsi de suite jusqu'à la sixième et dernière scène d'amour, où le désir et les sentiments se mêlent à parts égales.
C'est lorsque les amants commencent à se livrer et quand le film se fait plus bavard que l'on réalise quelle était la force de la première partie de Lady Chatterley : son côté mutique, austère, triste et glaçant. Quand les mots se mettent à affluer, on trépigne, d'autant que bien des dialogues sonnent plutôt faux. Si le mystère et l'empoignade physique vont plutôt bien au drôle de couple formé par le brave Jean-Louis Coulloc'h et la délicate Marina Hands, les voir pleurnicher dans les bras l'un de l'autre en causant grands sentiments et philosophie nuit à la crédibilité de l'ensemble. À cet égard, la scène finale est un massacre, un pataquès sirupeux même pas digne de Jane Austen, qui ruine une partie des beaux efforts de Pascale Ferran. Il n'empêche, Lady Chatterley est souvent un film beau et fort, dont la longueur est un atout, mais qui aurait gagné à poursuivre jusqu'au bout son admirable économie de mots.
7/10
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