À la fin de Dans Paris, Christophe Honoré organisait les retrouvailles de Romain Duris et Joana Preiss sous la forme d'une courte scène chantée. Le morceau d'Alex Beupain, "Avant la haine", donnait à ce très grand film une dimension supérieure, une mélancolie teintée de surréalisme. La réussite de cette scène a sans doute conforté Honoré dans son envie de réaliser Les chansons d'amour, comédie dramatique où les sentiments s'expriment en musique.
Il faut bien l'avouer : la déception est grande. On sent d'entrée que la désinvolture désespérée de Dans Paris s'est transformée en un jem'enfoutisme latent. L'image est moche, les comédiens peu habités (sauf un), les chansons de qualité variable. Pourtant, les inconditionnels du travail d'Honoré savent bien qu'il est capable de préparer le meilleur des ragoûts en n'utilisant que des ingrédients quelconques. Ce n'est malheureusement pas le cas ici : jamais Les chansons d'amour ne décollera vraiment, sauf peut-être au détour de quelques refrains bien trouvés.
Le scénario est une juxtaposition de vignettes très (trop) inspirées par Truffaut, Demy, Bunuel. Film sur l'amour multiple? Sur la mort qui rôde? Sur la perte de repères? On ne sait pas. Honoré effleure chacun de ces sujets avant de s'en débarrasser promptement, visiblement pas plus intéressé que nous. À l'occasion des sorties des trois premiers longs du jeune metteur en scène, on a souvent entendu des critiques peu inspirés le qualifier de cinéaste bobo, faisant claquer ce dernier terme comme s'il s'agissait du pire des défauts. C'était à la fois faux (le cinéma d'Honoré est littéraire et torturé avant d'être bobo) et mal trouvé. Ici, pourtant, les détracteurs radoteurs du réalisateur auraient presque raison : Les chansons d'amour est un film bobo dans le sens le plus cliché du terme (c'est-à-dire tel que le chante Renaud dans son pathétique dernier album). On navigue de lofts en endroits branchés, on s'habille décontracto-smart, on ne fait rien comme tout le monde, on chante comme Vincent Delerm (on pratique d'ailleurs le name-dropping). Tout cela situant au premier plan d'un film sans matière, voilà qui donne une piteuse image d'un cinéma d'auteur français souvent vilipendé à tort.
Heureusement, il y a Louis Garrel : drôle, subtil, aérien, puis subitement grave, Loulou semble capable de faire vivre un film à lui tout seul. Le blanc de ses grands yeux et ses mimiques incessantes permettent de ne pas sortir totalement déprimé de ce concentré de talent gâché. Snif.
4/10
DIAMANT BRUT
Il y a 14 heures
1 commentaire sur “LES CHANSONS D'AMOUR”
J'ai finalement vu ce film que j'ai trouvé très beau, désolé de te décevoir. En fait non, je suis pas désolé et je te merde. Mais je me suis demandé après l'avoir vu pourquoi j'étais passé à côté, et je comprends maintenant : "4/10". Heureusement qu'il t'arrive d'être de bons conseils, sinon j'abandonnerai ce site - maintenant que je ne suis plus le seul lecteur tu serais soulagé de me voir partir sale rat crevé ! Donc en fait pour le plaisir de t'embêter et de te mettre le nez dans tes critiques arrêtées ("Ouais Incassable c'est trop bien") je vais continuer à venir sur ton blog pourri.
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