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4 avr. 2009

SYNECDOCHE, NEW YORK

Trop souvent catalogué comme un simple petit malin, Charlie Kaufman révèle sa vraie nature avec Synecdoche, New York : ce type est juste un fou complètement génial. Avec lui, la mise en abyme n'est qu'un commencement, et est elle-même mise en abyme jusqu'à l'épuisement. Un épuisement qui guette d'ailleurs le spectateur de ce film d'une grandeur dévastatrice, d'abord replié sur lui-même dans un autisme absolu, avant de soudainement s'ouvrir au monde, de le réinventer sans cesse et d'en extraire la substantifique moëlle. Synecdoche, New York est à des lieues de ce qu'il semble être, c'est-à-dire un simple procédé scénaristique destiné à épater la galerie. Ce n'est pas seulement l'histoire d'un type qui met en scène l'histoire de sa vie avant de mettre carrément sa vie en scène ; ce qui se déroule sous nos yeux ébahis, c'est juste l'histoire de l'humanité, de la naissance de l'art, du caractère éphémère de nos existences. Le tout dans un style évidemment emphatique, mais jamais en roue libre. Une pure claque, anxiogène et admirable.
Voilà un film foncièrement inconfortable, singulièrement cahotique, à la temporalité totalement déréglée. Une seconde passe en un siècle, un siècle en une seconde, et voilà Caden Cotard (Philip Seymour Hoffman, juste assez excessif pour le rôle) qui se perd avec nous dans cette spirale chronologique allant au-delà de l'ellipse. L'écriture de Kaufman est si précise qu'il parvient à nous déposséder de nos repères, à nous plonger dans l'inconnu sans pour autant nous larguer une seule seconde. En deux heures, il brasse plus de thèmes que bien d'autres en une vie entière, les abordant de façon frontale et gonflée. On a réellement l'impression de vivre en accéléré, de multiplier les expériences déstabilisantes, de comprendre enfin ce qu'est l'art et de se poser les bonnes questions sur son utilité ou son inutilité. C'est un truc totalement fou, qui en laissera plus d'un sur le bas côté, une oeuvre si riche et indescriptible qu'il vaut mieux ne rien en dire, poser là son clavier et retourner la voir, encore et encore, quitte à en devenir complètement taré.
8/10

(autre critique sur Tadah ! Blog)

16 déc. 2008

MISTER LONELY

Il a un peu trop goûté à l'héroïne, perdu ses scénarios dans un incendie, entré dans une secte, fait le maître-nageur puis travaillé dans le bâtiment. Après quelques années difficiles, revoilà enfin Harmony Korine, 35 balais et regonflé à bloc. La parenthèse ouverte après Julien donkey-boy est donc refermée, et c'est un Korine plus mûr qui nous présente Mister lonely, son dernier bébé. Ou le portrait d'une bande de sosies, vivant retranchés de la société pour échapper au regard moqueur des quidams et préparer ensemble un grand spectacle. Évidemment, on est bien loin de Podium : après une rapide présentation du héros, sosie de Michael Jackson, on découvre avec lui les Highlands écossais, leur calme plat, leurs paysages à perte de vue. Le début d'une longue introspection.
S'ils se représentent d'abord à travers la personne qu'ils tentent de copier avec plus ou moins de réussite, ces gens-là sont d'abord des êtres solitaires, en marge, peinant à vivre à travers le regard des autres. Cette désorientation est au coeur d'un film à la ligne dramatique plus que ténue : Mister lonely ressemble davantage à un collage de petits moments plus ou moins forts qu'à un véritable long-métrage. Cette absence de cohésion et de direction est sans nul doute la talon d'Achille d'un film qui semble n'aller nulle part. Heureusement, il y a la belle mise en scène d'un Korine plus sûr de lui qu'avant mais toujours aussi sensibles aux fêlures et autres détails qui font et défont les individus.
Si Diego Luna (Bambi) et Samantha Morton (Marilyn) sont assez irréprochables, on doit les plus beaux moments du film à Denis Lavant, qui campe un Chaplin au moins aussi lunaire que l'original, et qui met à profit ses talents de saltimbanque pour créer une sorte de magie assez troublante. On s'attache à cet homme, le plus blessé de tous, qu'on aurait voulu voir davantage. Quand les lumières se rallument, on ne pense qu'à lui, gagné par la frustration de n'avoir pas fait plus ample connaissance. Korine a encore du travail pour (re)devenir le petit génie qui fit les beaux jours d'un certain cinéma indépendant, mais il a sans nul doute retrouvé le goût de l'écriture et de la mise en scène. Même si le film convainc moyennement, on est en droit de s'en féliciter.
5/10
(également publié sur Écran Large)

26 déc. 2007

ELIZABETH : L'ÂGE D'OR

On a parfaitement le droit d'aimer un film pour de mauvaises raisons. Pas sûr que Shekhar Kapur ait réalisé Elizabeth : l'âge d'or dans ce but, mais son film est un délicieux cours de vulgarisation historique, ornementé de 1001 breloques et kitscheries en tous genres. Et c'est merveilleux. Voilà un film à ne surtout pas conseiller aux amoureux de l'Histoire, la vraie, la sublime, avec ses cargaisons de dates, de faits, de détails importants. Le film de Kapur touchera surtout ceux qui ont toujours eu du mal à avoir la moyenne en histoire-géo et qui souhaitent un cours intensif pour mieux connaître l'Angleterre du XVIème siècle. Peu adepte de la nuance, il force le trait afin que l'on reconnaisse d'emblée les espagnols, les russes, les anglais. Ça semblerait presque fin face à la façon dont il traitait les français dans Elizabeth il y a dix ans de cela (Vincent Cassel en grand folle, et Eric Cantona en début de reconversion, c'était quelque chose).
Ce cours d'histoire express séduit par la démesure dont il fait preuve. Les acteurs jouent de façon théâtrale, mais le font plutôt bien ; les décors, les monologues, les costumes, tout est absolument excessif, et c'est formidable. Cate Blanchett a parfaitement compris le principe et surjoue juste comme il faut une Elizabeth aux deux visages : la monarque sans coeur uniquement préoccupée par le destin de son Angleterre chérie, et la femme fragile, tombée subitement amoureuse d'un aventurier qui passait par là. Celui-ci est interprété par Clive Owen, qui se régale dans le rôle du beau gosse, multipliant oeillades et courbettes en étant parfaitement consciet de son sex-appeal. À la fin, le voir gagner une bataille maritime contre les espagnols à lui tout seul est proprement joussif : on est a priori dans un film historique, mais Owen noue la joue Jack Sparrow.
Alors oui, c'est certain, si Kapur voulait faire du Chéreau ou du Kubrick, c'est extrêmement raté ; en revanche, à condition d'y aller décontracté et sans autre exigence que d'absorber de la culture de masse et d'en prendre plein les yeux pendant quasiment deux heures, Elizabeth : l'âge d'or est un spectacle faramineux.
8/10

19 oct. 2007

CONTROL

En ces temps où les lois gerbantes s'imposent comme autant de fleurs de béton, proposons à notre tour de muscler la règlementation sur le cinématographe, en interdisant dorénavant l'usage de la pellicule couleur, même pour les comédies de Claude Zidi, au profit unique de l'image noir et blanc. À condition de ne pas être traitées façon Sin city, les nuances de gris favorisent l'exaltation, l'émotion, l'implication su spectateur dans le film.
Le noir et blanc est loin d'être la seule qualité de Control, mais c'est sans doute quand même son atout numéro 1. Refusant de céder à la mode du clippeur-qui-impose-son-staïle-bigarré-et-funky, Anton Corbijn propose un film esthétiquement irréprochable, dont l'image parvient à être fine et charbonneuse à la fois, et qui restitue parfaitement l'atmosphère des chansons de Joy Division. Pas tout à fait biopic sans être non plus une envolée façon Last days, le film est d'abord une plongée dans les obscurs tréfonds de la dépression. S'il est forcément question de musique ici, et pas n'importe laquelle, elle est d'abord considérée comme une souffrance, un exutoire ou un impératif avant d'être un plaisir et un art à part entière. Mi Pete Doherty mi Gainsbarre, Sam Riley prête à Ian Curtis sa parfaite gueule de petit oiseau suicidaire. La puissance elliptique du récit et la façon qu'a Corbijn de dire plus en un plan que certains en un roman est l'une des grandes forces du film.
On pourra tout de même émettre quelques réserves sur la facette sentimentale du film, pas toujours très profonde, dont le côté "je t'aime moi non plus" aurait pu être amené avec plus de délicatesse et moins de redondance. Riley a un tel pouvoir hypnotique que l'on regrette presque de trop voir la pauvre Samantha Morton (qui a pourtant une vraie gueule et un sacré potentiel émotionnel). Reste que pour un premier long venu d'un spécialiste du vidéoclip, Control est une surprenante petite pépite, parfaitement en phase avec son titre. Ce qui n'est pas qu'un avantage.
7/10
 
"Bienvenue au royaume du pisse-froid inculte qui est au cinéma ce que Philippe Manoeuvre est au rock" (© Trollman)
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