
Dans sa trilogie passée, Belvaux avait ancré l'intrigue à Grenoble, ville lumière à flanc de montagne, pour mieux étouffer ses personnages et les acculer à une réalité souvent glacée (mais parfois légère). Ici, il a choisi de poser sa caméra du côté de le Belgique, avec ses usines, ses voies ferrées, ses entrepôts. Couleur dominante : le gris. Belvaux utilise tout cette grisaille comme un personnage supplémentaire, celui qui viendrait asséner le coup de bambou derrière la nuque des autres. C'est réussi mais pas franchement original, malgré son coup de patte talentueux.
L'aspect polardeux apparaît d'abord comme un McGuffin destiné à faire parler chacun de sa condition, à cracher sans concession tout ce qu'il a sur le coeur. On en serait bien resté là, mais apparemment pas rassasié par sa précédente Cavale, Lucas Belvaux a tenu coûte que coûte à remettre le couvert. Du coup, la fin, avec son lot de coups de feu et de fuites en avant, masque la jolie (mais molle) construction sociologique du film. Et le titre ne veut par conséquent plus dire grand chose.
S'appuyant sur des comédiens efficaces (les moins connus étant les meilleurs), Belvaux a un peu tendance à trop se donner le beau rôle. Lui qu'on pensait si modeste, si humble, semble tenir à tout prix à faire la course en tête, à être le héros en solitaire d'un film qui aurait dû rester collectif. À cet égard, la fin, bien que magistralement filmée, est plutôt ratée car complètement irrespectueuse. Le plan-séquence aérien qui clôt le film, lourd de sens sans pourtant en faire trop, arrive trop tard : La raison du plus faible manque son impact en ne sortant jamais vraiment de son carcan socialo-franchouille. Ou plutôt belgeouille. Ô rage, ô désespoir.
6/10
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