PRIMER

Quatre jeunes types en costard font des expériences dans un garage. Ça a l'air à la fois très sérieux, très complexe et follement amusant. Un jour, en discutant de leurs travaux autour d'un bon verre de jus d'orange, deux d'entre eux prennent conscience que le machin truc qu'ils viennent de créer pourrait bien être une machine à voyager dans le temps. Et ce qu'il y a de génial au premier abord avec ce Primer, c'est que malgré l'ampleur de cette découverte potentielle, tout le monde garde la tête froide. Pas de "et si on retournait en 1930 buter Hitler", pas d'hystérie totale, aucun sensationalisme.
Fait de bric et de broc, le film de Shane Carruth conserve tout du long une sorte de rigueur et de précision scientifique. Comme lors d'un processus de recherche, il faut être patient, répéter à l'envi la même expérience, et être très attentif face à ce qui se produit. De microvariations en microvariations, à l'aide d'un langage scientifique très complexe mais bizarrement accessible, Carruth donne une seconde jeunesse à un thème un peu éculé : le voyage dans le temps.
Les deux héros du film connaîtront évidemment quelques ennuis. Ils se trouveront face à des questions délicates, auront des décisions importantes à prendre et des conclusions fondamentales à tirer. Et tout cela dans le plus grand calme, comme si le film parlait de l'invention de l'eau tiède. C'est ce détachement, ainsi qu'une intrigue discrète mais formidablement intelligente, qui font de Primer une réussite de tout premier plan. Un film qui mérite des visions multiples pour être certain d'avoir tout compris, et pour mieux en apprécier toutes les subtilités. Un film de 77 minutes au budget ridicule, tourné en 2001, qui fait mieux que la masse des films de SF qu'on nous impose chaque année. Ça donne envie de remonter le temps pour le découvrir beaucoup plus tôt.
9/10