29 nov. 2006

COEURS

Cinéaste estampillé Nouvelle Vague à l'époque où cea voulait dire quelque chose, Alain Resnais est devenu depuis un vieux monsieur poli et appliqué dont les films sonnent comme autant de petits frissons de nostalgie. Toujours ancrés dans le passé, vieillots par leur sujet ou leur traitement, les derniers longs métrages de monsieur Resnais ont tous tendance à sentir le renfermé, qu'ils soient bons ou moins bons. Coeurs n'échappe pas à la règle : troisième film choral de suite pour le réalisateur d'On connaît la chanson et Pas sur la bouche, toujours le même casting à quelques variations près, et toujours cette peur du temps qui passe. Les personnages de Coeurs sont justement des coeurs solitaires, qui ne se croisent pas tous et n'échangent de l'amour qu'à de rares reprises. La mort (d'une mère, d'une femme) rode, l'absence est écrasante, et les heures qui défilent semblent ne rien arranger. À cet égard, Coeurs sonne presque comme le testament prématuré d'Alain Resnais, comme s'il se confiait juste avant de mourir.
Mais Coeurs est également un film très bizarre manquant gravement d'unité et de cohésion : on a souvent l'impression de regarder un montage de plusieurs moyens métrages maladroitement imbriqués. D'autant qu'on sent peser là aussi l'âge avancé de Resnais : si la mise en scène feutrée mais un peu trop floue est plutôt acceptable, on peut légitimement être horripilé par un montage unidimensionnel et purement décoratif. En lieu et place des traditionnels fondus au noir ou des simples cuts, Resnais nous offre d'un bout à l'autre des "fondus enneigés", comme si on vaporisait un peu de neige artificielle sur la pellicule et qu'elle s'effaçait alors pour laisser place à la scène suivante. Moche et sans justification aucune.
Côté acteurs, difficile d'être surpris : la bande à Resnais est toujours la même, tout le monde s'applique, mais il n'y a pas vraiment d'étincelle. Bizarrement, les comédiens les plus agaçants en règle générale (Arditi, Azéma) sont sans doute ceux qui s'en sortent le mieux. Il faut dire que Sabine a hérité d'un personnage assez incroyable, le moins crédible de tous mais le plus intéressant et surprenant. En revanche, DUssollier sombre dans le marécage d'un personnage ni fait ni à faire, qui se trouve au centre de scènes de farce indignes du plus mauvais théâtre de boulevard (le quiproquo de la VHS est d'un insondable ennui).
Comme pour les derniers films d'Alain Resnais, on a du mal à donner un avis tranché sur Coeurs, un film parfois attachant mais avec un bon demi-siècle de retard. Comme si Resnais tentait de faire au 21ème siècle tous les films "normaux" qu'il n'a pas faits dans les années 60.
6/10

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"Bienvenue au royaume du pisse-froid inculte qui est au cinéma ce que Philippe Manoeuvre est au rock" (© Trollman)
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