6 oct. 2006

LE PARFUM - HISTOIRE D'UN MEURTRIER

Ce diable-là ne s'habille pas en Prada, et il est bien plus effrayant que Meryl Streep. Tout droit tiré du fameux roman de Patrick Süskind, Jean-Baptiste Grenouille est un homme dont le nez suprêmement fin est à la fois une arme chimique et une souffrance profonde. Un personnage singulier, inquiétant et charismatique qui fait du mal aux autres pour ne pas s'autodétruire.
Outre le fascinant personnage de Grenouille, la grande qualité du roman de Patrick Süskind est sa capacité à faire se matérialiser toutes les odeurs du monde en quelques mots. Un tour de force assez impressionnant, qu'on voyait mal se reproduire sur grand écran. Après de nombreuses tentatives avortées d'adapter un tel projet au cinéma, c'est finalement l'excellent Tom Tykwer qui s'y colle. Malheureusement, son talent ne suffit pas à reproduire les sensations du livre. Et le début du film, où le jeune Jean-Baptiste découvre le monde des senteurs, semble du coup un peu plat (malgré une scène de mise au monde poisseuse et troublante).
C'est ensuite que Le parfum se fait plus convaincant, lorsque Grenouille se découvre une double vocation : il sera parfumeur et meurtrier. Deux occupations opposées a priori, mais qui se conjuguent si bien lorsqu'il s'agit de créer le parfum ultime. Là, bien que certaines scènes soient plus réussies que d'autres, on retrouve la noirceur un peu crade du roman, qui constitue la meilleure partie du film. D'autant que Tykwer et ses coscénaristes ont effectué un excellent travail d'adaptation, rabotant les passages les plus ennuyeux pour ne conserver que le plus consistant.
La fin du roman avait de quoi laisser circonspect : il fallait vraiment avoir envie d'y croire pour que ça fonctionne. Il en va de même avec le film : la réussite de la grande scène d'orgie populiste n'empêchera pas les plus terre-à-terre de pouffer.
D'un classicisme à toute épreuve malgré la bizarrerie du sujet, Le parfum aurait certainement gagné à explorer plus en profondeur le côté crasseux et désespéré du livre. Mais adaptation grand public oblige, certaines aspérités ont été savamment gommées. Grenouille était censé être la laideur incarnée, un type affreux que seul son parfum ultime pouvait rendre désirable aux yeux du monde. Ici, malgré la fascinante attraction exercée par l'excellent Ben Whishaw, Tykwer a affadi le personnage en en faisant un jeune mec pas plus moche qu'un autre, sans réelle raison de haïr le monde comme il le fait. C'est par ce genre de petits détails que Le parfum, malgré une impression d'ensemble plutôt positive, échoue à transcender une histoire forte mais pas simple à raconter.
6/10

1 commentaire sur “LE PARFUM - HISTOIRE D'UN MEURTRIER”

bb.blon a dit…

Tout à fait en accord avec ce qui est dit! Le livre est d'une subtilité tel, qu'il est impossible,pour un film, de nous faire ressentir le même fond!

 
"Bienvenue au royaume du pisse-froid inculte qui est au cinéma ce que Philippe Manoeuvre est au rock" (© Trollman)
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