14 sept. 2006

TAXIDERMIE

György Pálfi n'a pas fini de nous étonner. À 32 ans et en seulement deux films, le monsieur a déjà sa place au paradis des cinéastes barrés. Après un drame policier rural et muet (Hic), voici Taxidermie, récit de la vie peu ordinaire d'une famille hongroise sur trois générations.
Trois actes de loufoquerie égale. L'acte I se focalise sur Morosgoványi, pauvre type à la solde d'une famille qui l'ignore. Pálfi centre son premier récit sur la queue du pauvre type : elle crache du feu et rentre à peu près n'importe où (un trou dans un mur, de la vaseline, c'est une affaire qui roule). Récit imrobable et onirique de la vie fantasmée d'un mec qui s'enuie tellement qu'il n'a de cesse de jouer avec son engin. Dans l'acte II, le fils de Morosgoványi, est un athlète obèse. Si si : il est l'un des champions de Hongrie d'ingurgitation en grosse quantité. Flageolets, caviar, longes de porc : c'est tout un entrainement. Cette fois, Pálfi est fasciné par le vomi. Ça gerbe dans tous les coins, après ce genre d'épreuve. Merci d'aller voir le film avant de manger. Une histoire impitoyable d'esprit compétition et de rivalité amoureuse, interprétée uniquement par des gens pesant plusieurs quintaux. Slurp. Pour finir, le troisième et dernier acte met aux prises le champion de grosse bouffe et son propre fils qu'il hait (et pour cause : celui-ci a l'extrême mauvais goût d'être aussi maigre que son père est gros). Le fiston est devenu empailleur et vit seul, trop seul. Confrontés à leurs solitudes respectives, les deux hommes se jaugent et se méprisent. C'est le volet le plus désespérant, qui se termine de façon assez dantesque. Son centre de gravité : les boyaux.
Quéquette + vomi + tripes, on l'aura compris, Pálfi est obsédé par la matière, le gluant, le suintant, les bruits de succion et autres réjouissances. Si ça peut légitimement faire fuir tout un chacun, on peut aussi prendre Taxidermie comme un monument d'humour grinçant ornementé par une mise en scène toujours surprenante. S'il est bien loin de Hic, Pálfi manifeste à nouveau son penchant pour les détails les plus infimes, qu'il pointe du doigt à merveille. C'est comme si Kusturica rencontrait Matthew Barney, sauf que c'est en plus très drôle. À ne pas mettre entre toutes les pognes, Taxidermie signe cependant la confirmation d'un talent rare et singulier. La Hongrie peut être fière de son rejeton.
8/10

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"Bienvenue au royaume du pisse-froid inculte qui est au cinéma ce que Philippe Manoeuvre est au rock" (© Trollman)
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