31 mai 2006

ZIDANE, UN PORTRAIT DU 21ÈME SIÈCLE

D'un côté, il y a les footeux, de l'autre, les autres. Et la propension des premiers à adorer Zidane et à peu près égale au potentiel de rejet viscéral des seconds.
Pourtant, en adoptant un point de vue des plus neutres, ce Portrait du 21ème siècle (titre ô combien pompeux, certes) est une vraie curiosité, une oeuvre d'art unique et attirante, aux multiples degrés de lecture.
D'abord, c'est beau. Passées les cinq premières minutes, où les images sont hachées et granuleuses (plus tard, on comprend que c'est le générique, et on apprend qu'il est fait par les artistes très en vogue connus sous le nom de M/M), Zidane est d'abord foudroyant de beauté plastique. Un enchainement de tableaux vivants prenant pour héros un homme dont certains ont fait un Dieu, mais en tout cas un homme pas dégueu à regarder, et dont le regard sage impose une sorte de respect immédiat et d'inévitable fascination. On a beau se foutre du foot, il y a là-dedans quelque chose d'irrémédiablement puissant.
On peut voir également Zidane comme un véritable portrait, celui d'un homme dont on a tant vanté le génie mais qui passe environ une heure par match à attendre qu'on veuille bien le solliciter. En cela, le football n'est pas si éloigné de la comédie : patienter pendant de longs moments, puis se transcender l'espace de quelques secondes, puis attendre de nouveau. On sent chez ce mec une frustration énorme, celle de ne pas pouvoir toucher plus souvent cette si mystérieuse balle de cuir.
Évidemment, tout cela passe un peu au-dessus de la tête des non-footeux absolus (mais on se demande bien pourquoi ils iraient voir ce film). Alors les deux réalisateurs ont voulu injecter à leur oeuvre une part de philosophie. C'est surtout là que le bât blesse. Après quelques pensées éculées sur le milieu du foot (tout cela en sous-titre, pour ne pas altérer le magnifique travail sonore), ils ont par exemple greffé entre les deux mi-temps une sorte de mini-journal du 23 avril 2005 (la date du match immortalisé dans le film), comme pour justifier ce titre de Portrait du 21ème siècle. Le message n'est évidemment pas clair. Et surtout, il est inutile. La beauté du football telle que la défendent les puristes devrait se passer du moindre commentaire. Et qu'on aime ou pas, tout le monde doit bien s'accorder sur le fait qu'il y a plus important dans la vie.
En faisant abstraction de cette philosophie de bazar, on pourra ressentir Zidane comme une jolie promenade apaisante. Rendez-vous compte : du foot sans les commentaires de Thierry Roland, sans l'odeur de sueur ou les insultes de gros types pleins de bière, c'est quand même déjà plus appréciable. Et quand le son est aussi beau (un peu cotonneux, d'une précision stupéfiante, bien relayé par la musique planante de Mogwaï), ça devient beau. Aussi apaisant qu'une heure chez Nature & Découvertes.
Bref, Zidane, un portrait du 21ème siècle est une bizarrerie plutôt réussie dans son genre, mais qui ne convaincra évidemment pas les intégristes anti-foot de jeter un oeil sur un match. D'autant que le héros serein du film est en passe de raccrocher les crampons.
7/10

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"Bienvenue au royaume du pisse-froid inculte qui est au cinéma ce que Philippe Manoeuvre est au rock" (© Trollman)
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