9 janv. 2008

30 JOURS DE NUIT

Profitons de la sortie de 30 jours de nuit pour nous remémorer la définition d'un film raté. Le film raté a tout pour être un bon, voire même un grand film ; tous les ingrédients nécessaires y sont présents, dans des quantités raisonnables ; pourtant, de façon plus ou moins claire, il foire piteusement sa cible. Ce n'est pas que le deuxième long de David Slade soit particulièrement mauvais, mais il fait indéniablement partie de ces oeuvres destinées à l'oubli alors qu'elles auraient pu terminer au panthéon.
Un film raté, normalement, ça ne s'explique pas. Essayons quand même en dressant la liste de ce qui aurait (éventuellement) pu être fait autrement pour (éventuellement) aboutir à un résultat moins frustrant. D'abord engager à la place de Josh Hartnett un acteur plus mûr, plus mâle que cet acteur fort potable mais dont la gueule d'éternel ado sied moyennement à ce genre de film. Ensuite exploiter au maximum l'excellent postulat de départ. 720 heures sans rayon de soleil, c'est le rêve de tous les vampires, et ceux du film semblent ne pas en profiter, faisant preuve d'une passivité assez étonnante. Et puisque cette nuit interminable doit bien se terminer un jour, il aurait sans doute été judicieux de jouer plus à fond la carte du compte à rebours (même si à la fin on comprend que les scénaristes ont d'autres ambitions).
Les bons points, maintenant. D'abord une photographie assez remarquable, avec des plans beaux comme des tableaux, d'où jaillissent des couleurs ahurissantes. Quelques mouvements de caméra à la Fresnadillo auraient pu être évités pour plus de clarté. Il y a ensuite ces fameux vampires, plus humains que jamais, inquiétants et effrayants par la grâce du maquillage (et pas de ces effets visuels absolument pourris que les studios sont persuadés de maîtriser de A à Z).
L'une des bonnes idées du script, c'est de donner à chaque suceur de sang une identité propre (le leader, la femme fatale, le gros chauve ultra tenace...) et de faire de ces vampires de vrais salopards vicieux jusqu'à l'os plutôt que de simples victimes d'une dépendance hémoglobinaire. Résultat : par moments, on a peur. Mais moins que prévu. Toujours sans bien savoir comment expliquer cela. Quelques scènes d'action rivent le spectateur à son siège (dont une attaque de 4x4 quasiment filmée en ombres chinoises et l'irruption bien malsaine d'une vampirette en culottes courtes), mais celles-ci sont en minorité. Quant au script, s'il ne se prive pas de quelques passages obligés (le mec contaminé qui se sacrifie, le mec valeureux qui se sacrifie aussi, etc.), il donne aussi lieu à quelques scènes originales et dignes d'une vraie tragédie. Là encore, les cas de conscience proposés et les situations dramatiques devraient glacer le sang, mais l'émotion n'affleure pas. Ce qui fait de 30 jours de nuit un western sous la neige frustrant et malade, qu'on aurait voulu adorer ou haïr, et qui nous plonge dans une tiédeur bien regrettable.
5/10

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"Bienvenue au royaume du pisse-froid inculte qui est au cinéma ce que Philippe Manoeuvre est au rock" (© Trollman)
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