LE LABYRINTHE DE PAN

Pour la deuxième fois en cinq ans, Guillermo Del Toro a choisi de mêler fantastique et franquisme dans un conte à la fois onirique et inquiétant. La première fois, dans L'échine du diable, jamais le fantastique ne prenait le pas sur le réalisme dû au contexte historique. Aussi bien picturalement que scénaristiquement, le film avait du sens et du corps. On ne peut pas en dire autant en ce qui concerne ce Labyrinthe de Pan, mixture maladroite et peu convaincante qui a le cul entre deux chaises à force de ne pas choisir son genre. Del Toro prend pour héroïne une petite fille tiraillée entre le monde du réel (elle débarque avec sa mère enceinte chez son très très méchant beau-papa franquiste) et celui du conte (elle rencontre un faune qui lui propose des épreuves pour prouver qu'elle mérite d'être une princesse). Le mélange est improbable et assez mal construit, d'où un scepticisme total face à ce qui se déroule sous nos yeux.
Le plus dommageable pour le film est le déséquilibre total entre les deux parties. Les scènes réalistes sont souvent assez convaincantes, d'autant Sergi Lopez excelle dans le rôle du grand méchant de service (son cabotinage ne le rend que plus inquiétant). À l'opposé, on ne croit pas une seconde aux aventures fantastico-oniriques de la petite fille : les épreuves auxquelles elle est confrontée sont stupéfiantes de banalité, et si l'univers visuel un peu cracra est techniquement irréprochable, on est trop vieux pour y croire. C'est à se demander quelle est la cible du film : définitivement pas les enfants, pour qui le film est trop noir et trop violent, mais certainement pas les adultes, qui n'ont plus l'âge pour croire aux contes de fées. Apparemment, Guillermo Del Toro s'est lui-même pris au piège de son propre labyrinthe.
5/10