7 nov. 2011

Maintenant, c'est ici que ça se passe.

7 sept. 2011

Comment tuer son blog


C'est toujours délicat de tuer un blog. De l'étouffer à petit feu après 6 années passées à le nourrir, le chérir, lui offrir des ravalements de façade plus ou moins judicieux. Pourtant, il est temps.

Je n'aime plus ce blog, voilà tout. Les phases durant lesquelles je n'ai plus envie d'écrire le moindre mot sont de plus en plus nombreuses et de plus en plus longues. Je n'ai plus envie de défendre mon point de vue sur les films, en tout cas pas ici, pas comme ça. J'ai envie de choses plus personnelles, ou plus spécialisées. Peut-être les deux. J'ai envie de parler de films autour d'une bière, pas en alignant laborieusement 3 paragraphes avant de répondre laborieusement (et souvent de ne pas répondre) aux commentaires de quelques charmants fidèles et de désespérants anonymes. Surtout, je n'ai plus envie d'aligner les critiques comme on aligne les perles. Ni, il est vrai, d'être un blogueur cinéma parmi tant d'autres, désormais noyé dans la masse car dépassé par des petits jeunes plus ambitieux, plus assidus, plus désœuvrés que moi. Je déteste une partie du blogueur que je suis devenu, celui qui courait après les sollicitations, mendiait pour quelques clics comme si sa vie en dépendait, oubliait au final la notion de plaisir. J'ai perdu l'envie, je crois, et je compte bien la retrouver en levant le pied quelques temps. Et plus si affinités.

Je me souviens qu'en 2005, lorsque j'ai ouvert ce blog longtemps orange, nous n'étions que quelques-uns. Un Benoît par ci, une Camille par là, des gens simples et modestes à qui tout n'était pas dû et qui n'étaient mus que par l'envie de voir et de partager. Allez, jouons les vieux cons une fois pour toutes (j'ai 27 ans, c'est l'âge) : aujourd'hui, je déplore que la grande majorité de la blogosphère cinéma, moi y compris, ait perdu cette spontanéité. On pleure parce qu'on n'est pas invité à telle ou telle projection. On casse du sucre sur le dos de tel ou telle attaché(e) de presse qui ne vous a pas déroulé le tapis rouge. On écrit pour écrire. On vise l'exhaustivité, la visibilité sur Google. On revendique bien haut la fameuse indépendance d'esprit des blogueurs, leur totale liberté rédactionnelle, alors qu'ils sont au contraire en route vers un asservissement inévitable. Sur la forme et sur le fond, les conventions sont partout. J'aimerais avoir le talent pour tirer ce petit monde vers le haut, mais c'est impossible. La prolifération des blogs cinéma généralistes a eu un effet étonnamment nuisible. Parce que désormais, chacun se proclame expert du septième art dès qu'il possède 10 Blu-ray et a eu l'honneur immense d'être convié à quelques projections presse. Je ne veux plus appartenir à ce monde-là, qui patauge dans le mainstream mais pense appartenir à une élite.

Des blogs ciné, j'en lis peu. Je parle de lire vraiment. Les seuls que je parviens encore à lire avec plaisir sont ceux qui ont su conserver, par rigueur ou par nature, ce sens du spontané. Leurs auteurs ont su se rappeler qu'un blog, au départ, est censé être un espace personnel. Pas un site facilement personnalisable et livré clé en main sur lequel on peut se proclamer mollement critique. Je pense à elle, elle, elle, lui, lui, lui, lui, eux, et sans doute quelques autres que j'oublie sous le poids de la précipitation. Chacun a ses particularités, son style, ses lubies. Mais tous sont réunis par une passion qui ne fléchit quasiment jamais. Droits dans leurs bottes, sans poudre aux yeux, ils parlent VRAIMENT de cinéma. Oui, VRAIMENT. Avec de belles grandes majuscules. C'est ça que j'aimerais pouvoir faire ou refaire un jour, quand je serai assez grand pour cesser un peu de me prendre pour un grand cinéphile doté d'une mission divine. Écrire bien et savoir pourquoi j'écris. Le faire quand j'en ai vraiment envie, pas parce que le film sort après-demain et que c'est le moment. Aller voir des films et savoir délibérément que je n'écrirai pas une ligne dessus.

Alors voilà. Je ferme ce blog. La couleur grise aura eu raison de moi. Je compte bien poursuivre mes collaborations actuelles si Snatch Magazine et Playlist Society veulent toujours de moi, et pourquoi pas en entamer d'autres si tout cela est placé sous le signe de l'envie. Et je continue à réfléchir à un espace plus à mon image, avec d'autres règles et d'autres perspectives. En tout cas, je ne veux plus être un blogueur cinéma au sens 2011 du terme. Avec tout le respect que j'ai pour certains d'entre eux.

J'aurais bien aimé que ce billet soit bourré d'humour, de bons mots, de petites piques justes assez bien dosées pour faire marrer sans blesser personne, mais je crois que je ne sais pas faire. Ce n'est pas rien, de tuer son blog. C'est à peine moins douloureux que de se couper un bras. On tire un trait sur des heures à trimer sur son clavier, des expressos à n'en plus finir, des litres de sueur à l'idée d'interviewer tel ou tel artiste qu'on admire (plus beaux souvenirs : Mia Hansen-Løve, Jonathan Zaccaï, Bong Joon-ho, João Pedro Rodrigues, Valérie Donzelli & Jérémie Elkaïm, Miranda July). Ça ne veut pas dire qu'on oublie ou qu'on renie le passé. Ça veut juste dire qu'on passe à autre chose. Est-ce que je ne risque pas de regretter ce geste ? Si, sans doute. Demain, après-demain ou dans un mois. Mais je sais ce que je perds et je sais ce que je gagne. De toute façon, n'en déplaise à ceux qui ne peuvent pas me blairer (avec plus ou moins d'humour), je reviendrai un de ces quatre. Plus discrètement. Avec tout à prouver. Ou plutôt rien à prouver. Je ne serai jamais journaliste ou critique professionnel. Juste un modeste cinéphile se réservant le droit de dire ce qu'il pense ou de le garder pour lui, et de préférer de plus en plus souvent la vraie vie.

Merci pour vos clics, vos remarques, vos compliments et vos insultes. Vous pouvez toujours me contacter ici si ça vous chante, ou m'oublier illico. Je vous embrasse, les loulous. Vous me manquez déjà.

13 août 2011

COMMENT TUER SON BOSS ?

Niveau comédies américaines, il semblerait que 2011 soit bien partie pour décrocher le titre de pire année de l'histoire. Chaque nouvelle sortie semble en effet faire pire que la précédente, comme si une crise d'inspiration générale avait frappé les réalisateurs et les scénaristes. On constate d'une manière générale un manque de sang neuf, que ce soit dans le choix des sujets ou la construction des castings. Consensuelle, teintée de beauferie, la comédie US 2011 n'a quasiment aucune leçon à donner à son homologue française. C'est dire si son niveau est faible.

Avec son sujet tape-à-l'oeil et son casting foisonnant, Comment tuer son boss ? donnait pourtant envie de se pencher sur la question afin de trouver enfin de quoi se dérider les zygomatiques. Le résultat est hélas extrêmement faible, déjà parce que le film souffre d'un déséquilibre assez fatal. Ses trois héros, employés modèles souhaitant poursuivre une vie professionnelle bien rangée sans faire de mal à personne, manquent sérieusement de fantaisie et sont avant tout caractérisés par une platitude franchement consternante. En revanche, les fameux boss qu'ils rêvent d'exterminer sont bien plus originaux, mal élevés, arrivistes et médiocres. Donc potentiellement bien plus drôles. Résultat : on passe un temps fou en compagnie d'un trio de blancs becs ennuyeux à mourir alors qu'on rêverait de passer davantage de temps avec leurs patrons affreux, sales et méchants.

Extrêmement faible, l'écriture ne permet malheureusement pas à cette brochette de chefs hauts en couleur d'exister pleinement, et la drôlerie de leurs apparitions est finalement assez limitée. Il faut tout l'abattage de Kevin Spacey (en sale con aux dents très longues, façon Swimming with sharks), la folie nouvelle de Jennifer Aniston (excellente en dentiste chiennasse) et surtout le sens du contre-emploi de Colin Farrell (fabuleux beauf cocaïné) pour parvenir à sauver une poignée de séquences. Également présent dans le rôle d'un miteux "consultat en crimes", Jamie Foxx se débrouille plutôt bien également. Merci à eux quatre de nous sauver de la dépression.

Pour le reste, Comment tuer son boss ? est un film éminemment mensonger, qui nous promet de se tourner vers la comédie noire en fin de course mais trouve le moyen d'effectuer quelques pirouettes assez consternantes pour éviter que la moindre goutte de sang n'abime les petites chemises bien repassées des héros. Réalisé par un Seth Gordon visiblement persuadé que mettre de la musique tout le temps et très fort permet de masquer un manque de rythme criant, le film se voudrait rocambolesque mais n'est que mollasson. À l'image d'un Jason Bateman étonnamment carbonisé, comme si la nullité cosmique de Jason Sudeikis et la voix haut perchée de Charlie Day avaient suffi à enrayer le génie comique du héros d'Arrested development.

Tandis que Mes meileures amies tente d'apporter un souffle comique différent ou en tout cas d'autres points de vue, Comment tuer son boss ? semble confirmer en tout cas qu'une certaine comédie américaine est morte : les fameux films de potes et autres bromances ont sérieusement du plomb dans l'aile, et devront s'éclipser pour un temps afin de trouver un nouveau souffle sous l'impulsion de scénaristes plus affûtés et plus en phase avec leur temps.



Comment tuer son boss ? (Horrible bosses) de Seth Gordon. 1h40. Sortie : 17/08/2011.

10 août 2011

EL BULLI - COOKING IN PROGRESS

Le 30 juillet dernier, El Bulli fermait ses portes après un ultime dîner offert à son personnel. Situé en Catalogne, El Bulli fut élu meilleur restaurant du monde à 5 reprises entre 2002 et 2009, sous la direction du grand chef Ferran Adrià. Avant même de savoir que le restaurant allait bientôt tirer sa révérence — l'événement n'est même pas mentionné dans le film —, le réalisateur allemand Gereon Wetzel décidait de réaliser un documentaire sur le restaurant au taureau, qui n'ouvre que six mois par an puis ferme le temps de recomposer patiemment une carte toujours plus étonnante. El Bulli, c'est 8000 couverts par saison pour près de 2 millions de demandes de réservations. Cooking in progress tente de nous expliquer les raisons de ce succès.

C'est un documentaire sans voix off, qui fait la part belle à l'image et à l'imagination. Fait un peu frustrant, jamais le chef Adrià ne s'expliquera face caméra. Pour des explications sur son mode de pensée ou la façon dont il est arrivé là, il faudra repasser. Le film de Wetzel se concentre presque uniquement sur le travail, maître mot de la vie du maestro et de ses très nombreux employés. C'est bien simple : lorsqu'elles fonctionnent à plein régime, les cuisines d'El Bulli ressemblent à une incroyable fourmilière, minutieusement organisée mais gagnée par une frénésie de tous les instants.

Le film débute en automne, au moment où le restaurant entre en mode hibernation. Wetzel suit longuement les préparatifs des prochaines recettes, qui relèvent davantage de la chimie que de la cuisine telle qu'on la connaît. C'est tout le principe de la cuisine moléculaire : tenter d'exploiter un aliment sous toutes les formes possibles et imaginables, en ayant recours à des machines diaboliques s'il le faut, puis tester chaque résultat afin de ne garder que le meilleur. Un procédé très scientifique où le facteur humain et sensitif semble finalement n'avoir que peu de place. Le réalisateur est-il admiratif ou un peu déçu lui aussi ? Difficile à établir, et c'est justement là que El Bulli - Cooking in progress pèche un peu : il ne prend jamais parti et se contente d'observer béatement.

Semaine après semaine, mois après mois, Adrià et ses nombreux adjoints compilent sur papier et sur support numérique l'ensemble des comptes-rendus illustrés effectués lors des très nombreux tests. Puis choisissent froidement, grâce à un système de notation, ce qu'ils finiront par servir à leurs clients. El Bulli ne fonctionne pas sur un mode entrée - plat - dessert : chaque visiteur y goûte une bonne trentaine de plats, en quantité souvent microscopique. Une bouchée ou deux, pas plus. Comme le dit Ferran Adrià à un sommelier qui passait par là, c'est d'abord la magie qui importe. Le goût ne passe qu'en deuxième. Le but est donc que quelques maigres grammes d'un alliage savamment réfléchi, le client soit étourdi. Un étourdissement qu'on ne ressent que moyennement face aux images certes belles de Wetzel, tant le film semble poser les limites de cette fameuse cuisine moléculaire sans coeur.

Cette absence de sentiments est parfaitement symbolisée par la façon qu'a Adrià de travailler et de goûter les plats (?) qu'on lui propose. Visage figé, regard dur et froid, il semble penser à autre chose, ne prendre aucun plaisir à tester et déguster les préparations. Son manque d'enthousiasme fascine autant qu'il agace, et finit hélas par devenir hautement communicatif. El Bulli - Cooing in progress est un film instructif, intéressant... mais certainement pas appétissant. La notion de plaisir qui constitue la base même de la cuisine française manque sacrément ici. Un film comme The trip de Michael Winterbottom ouvrait nettement plus l'appétit en quelques plans. Un regard plus acerbe et plus critique de la part de Gereon Wetzel aurait sans doute permis de compenser cet étrange défaut en nous focalisant sur autre chose.



El bulli - cooking in progress de Gereon Wetzel. 1h48. Sortie : 12/10/2011.

7 août 2011

L'artiste et le poker : un full sentimental



Est-ce à cause de Patrick Bruel ou de l'avènement des années Internet ? Toujours est-il que le poker, ce beau jeu de cartes aux dix mille variantes, effectue depuis quelques années une montée en puissance assez vertigineuse. Les pratiquants prolifèrent, les émissions TV se multiplient, et c'est un véritable phénomène qui ne cesse de prendre de l'ampleur sous nos yeux.

Qui s'est assis quelques heures devant une table de poker (ou face à un écran d'ordinateur, même si le plaisir est bien différent) sait bien à quel point il est difficile de ne pas devenir accro à cette discipline exigeante, aussi crispante qu'enthousiasmante, qui délivre son lot d'adrénaline et d'angoisse. Tenter de cerner ses adversaires, leur faire imaginer un jeu qu'on n'a pas en main, se voir déjà gagnant mais se faire coiffer au poteau, regretter éternellement une prise de décision malheureuse... les parties de poker sont des histoires, les tournois de vraies petites vies, avec une naissance, une croissance et une mort plus ou moins lente mais en tout cas inexorable. Fascinant à tous points de vue. Alors comment expliquer que les films consacrés au poker n'aient pour l'instant pas fait mouche ?

Laissons de côté les westerns, dans lesquels des parties de poker se jouent effectivement (voir par exemple La ville du diable, avec John Wayne dans le rôle principal), pour se consacrer à un cinéma plus contemporain, donc potentiellement plus ouvert sur le poker actuel, et sa variante la plus pratiquée, le Texas Hold'em. L'une des premières scènes d'Ocean's eleven montre comment Brad Pitt et George Clooney parviennent à truander de jeunes blancs-becs trop sûrs d'eux. Le film Les joueurs, avec Matt Damon et Edward Norton en tête d'affiche, dispense quelques scènes vaguement divertissantes mais s'intéresse surtout aux à côtés d'ordre pécuniaire. Quant à la comédie The grand, avec notamment Woody Harrelson, elle se consacre effectivement à un tournoi de poker, mais ses joueurs sont réduits à l'état de stéréotypes dans le simple but de faire rire. Bref, le cinéphile amateur de poker est frustré de voir ses deux occupations favorites peiner à converger de façon satisfaisante.

La première raison de cet échec chronique est simple : il s'agit généralement de réaliser des films s'adressant au plus grand nombre, y compris aux néophytes. Par conséquent, il faudrait à la fois expliquer les règles, les enjeux et les finesses du poker, puis dérouler une intrigue et des parties de façon crédible, le tout en deux heures à peine. Même le plus pédagogue des scénaristes risque de se casser les dents face à un tel défi : si le poker était aussi simple, il serait pratiqué dès l'école primaire.

Penchons-nous un instant sur les films consacrés aux échecs, autre discipline éminemment complexe : ils s'attardent davantage sur les grands champions, aussi géniaux que névrosés, que sur le jeu lui-même. Le modèle du genre, à savoir La diagonale du fou de Richard Dembo, est peut-être le seul film à se focaliser véritablement sur les échecs, pas seulement sur ceux qui le pratiquent avec génie. Coup de maître : avoir foi en l'intelligence du spectateur et rendre l'ensemble assez passionnant pour que les petits détails stratégiques difficilement explicables finissent par passer au second plan.

Autre difficulté : la façon de cerner les joueurs. Après tout, ce qu'il y a de fascinant au poker, c'est qu'on ne sait jamais véritablement qui on a en face de soi. Avant que les émissions télévisées ne leur permettent de décoder a posteriori les différentes mains jouées, les joueurs professionnels ne pouvaient jamais déterminer de façon certaine s'ils avaient été salement bluffés ou si leur opposant avait effectivement un jeu de plus haut niveau que le leur. Et c'est dans ce mystère éternel, cette frustration de l'inconnu, que s'opère une partie de la fascination exercée par cette discipline. Or, si l'on commence à tout dévoiler des joueurs, de leur tactique et de leurs cartes, cette aura risque de s'envoler en quelques scènes à peine. Difficile pour un réalisateur et un scénariste de garder la distance nécessaire pour en montrer suffisamment sans trop en dire.

Enfin, à supposer qu'un auteur trouve l'angle juste pour traiter convenablement du poker et de ceux qui le pratiquent, pas sûr que l'étrange rythme de ce jeu puisse coller à une adaptation cinématographique. Jouer au poker, c'est accepter que le temps se dilate, que les mauvaises mains se succèdent pendant des dizaines de minutes, que d'autres raflent la mise devant vos yeux... puis qu'en une main et quelques secondes à peine, tout change. La cadence des séries télévisées serait finalement plus adaptée pour rendre compte du rapport entre le joueur de poker et le temps.

L'artiste et le poker ont donc très fort à faire pour parvenir à trouver l'équilibre parfait entre une description juste du monde du poker et les contraintes de l'industrie cinématographique. Il y a pourtant des émotions communes dans ces deux disciplines : cette façon de ménager des surprises, de créer des fausses pistes, de garder d'autres atouts pour plus tard. Un jour peut-être, qui sait, une bande de petits génies parviendra à réunir ces deux arts et à en faire un chef d'oeuvre susceptible de toucher l'intégralité du public, connaisseur ou non.

Pour en lire plus sur le poker, cliquez sur le lien.

4 août 2011

THE TRIP

The trip risque de faire enrager ceux qui, depuis désormais plus de 15 ans, tentent de trouver un quelconque fil conducteur dans la carrière de Michael Winterbottom. Mais le cinéaste n'en a que faire. Tout comme il se moque bien de l'avis de ceux qui pourront estimer — un peu à juste titre — que The trip n'est qu'un film de vacances financé par le contribuable. Version courte d'une série (6 épisodes de 29 minutes) diffusée fin 2010 sur la BBC, ce long-métrage raconte en effet le voyage de presse de Steve Coogan et Rob Brydon, acteurs britanniques invités par The Observer à sillonner la campagne anglaise pour tester un certain nombre de restaurants gastronomiques. Quelques trajets épiques et quelques repas de choix : c'est tout le menu de ce Trip sans scénar, où le duo d'acteurs principaux joue son propre rôle et se paye le luxe de pouvoir improviser une bonne partie de ses répliques. Peut-on vraiment aller au cinéma pour regarder deux types tailler la route et manger des plats très appétissants ? La réponse est oui.

Car The trip est comme certains amis : on ne sait pas forcément pourquoi mais on les aime quand même, bien qu'ils soient parfois insupportables ou inintéressants. Dans le film Coogan et Brydon se retrouvent après des mois, voire des années sans se voir, et semblent aussi heureux qu'agacés de partager cette expérience ensemble. Il faut les voir chanter du Abba à tue-tête, procéder au pire concours d'imitations du monde (de Michael Caine à Hugh Grant), jouer mille milliards de fois la même réplique pour déterminer qui ferait le meilleur méchant dans James Bond, se demander pourquoi les héros des films de guerre doivent toujours se lever à l'aube... Bref, un voyage lambda, plein de trips entre amis, au sens "français du terme". Laissant libre cours à l'inspiration de ses deux acteurs, Winterbottom prend un plaisir incroyable à étirer jusqu'à plus soif certaines scènes et effets comiques. On ressent une sorte d'euphorie teintée de ras-le-bol, parce que Coogan et Brydon sont aussi cabotins qu'attachants.

Allant parfois fureter du côté des cuisines, Winterbottom filme des plats qu'on imagine succulents, puis laisse ses héros les engouffrer... sans forcément y faire attention. The trip est aussi un film sur ces bons moments dont on ne profite pas forcément comme il se doit, et sur le regret qui s'ensuit. Car c'est aussi l'occasion pour Steve Coogan de ressasser son amertume teintée d'ironie, lui qui aurait tant voulu devenir un acteur incontournable mais qui n'a pu devenir que l'idole d'une poignée de cinéphiles se délectant de chacune de ses apparitions. Un propos d'une franchise absolue, qui n'avait sans doute pas besoin d'être souligné par un épilogue inutile. Situé après le retour du fameux voyage gastronomique, on y voit Brydon retrouver femme et enfant pour son plus grand plaisir, tandis que Coogan nous la joue artiste esseulé, observant l'horizon depuis son grand appartement pour nous rappeler à quel point il a raté sa vie. La légèreté de The trip est quand même ce qu'il y a de mieux à en retenir.



The trip de Michael Winterbottom. 1h47. Sortie : 20/07/2011.

3 août 2011

BAD TEACHER

Au milieu des années 2000, Richard Linklater, Mike White et Jack Black mettaient tout le monde d'accord en mettant au monde ce qui fait désormais office de référence en matière de comédie-avec-des-profs-dedans. Ça s'appelait School of rockRock academy en VF, avec l'affreux Sébastien Cauet pour doubler Black — et ça dépotait sévère, les trois sales gosses cités plus haut ayant su trouver le dosage idéal entre une subversion bon enfant et une énergie bien contrôlée.

Bad teacher, lui, ne risque pas de rejoindre le film de Linklater au panthéon des grands films-avec-des-profs-dedans. L'idée était pourtant alléchante : il s'agissait de permettre à Cameron Diaz de jouer avec son image médiatique de garçon manqué - buveuse de bière- championne de rot - sacrée chaudasse, le tout dans l'objectif d'insuffler un vent de folie vulgos dans un système scolaire ne cessant de courir après les conventions. Soyons francs : de temps à autres, au gré d'une saynette ou deux, ça marche. il y a quelque chose d'assez plaisant à voir la miss Diaz se planquer derrière son bureau pour s'enfiler une mignonnette dans le gosier pendant que ses chers élèves regardent Esprits rebeles ou Scream. Le problème, c'est que tout a ne fait pas un film, surtout lorsqu'une intrigue laborieusement mise en place vient prendre toute la place avant de se dégonfler comme une baudruche.

Principale ligne directrice d'un script confondant roue libre et paresse : il s'agit pour la prof rock'n roll et incompétente de trouver l'imagination suffisante pour parvenir à rafler près de 10.000 dollars grâce à son job, le tout pour se payer une nouvelle paire de seins qui lui permettra à coup sûr de séduire un bon gros richard qui l'entretiendra jusqu'à la fin de ses jours. Pourquoi pas. Mais passée la scène vue et revue pendant laquelle elle pratique un lavage de voiture ultra-racoleur sous l'oeil de parents d'élèves hagards, l'enseignante en question rentre rapidement dans le rang, tout comme ce scénario qui met peu à peu les enjeux de départ à la poubelle pour virer in extremis vers un final digne d'une très mauvaise comédie romantique. Soit quelques scènes explicatives ont été sacrifiées au montage, soit Bad teacher est le film le plus mal écrit de l'année.

Pas très drôle, le film de Jake Kasdan souffre en outre d'un fâcheux manque de rythme et de percussion, ratant même quelques gags imparables de façon inexplicable. Et lorsqu'il tente de jouer sur le contraste entre l'héroïne intenable et ses collègues plus que consensuels, il semble piller en règle la fameuse série musicale Glee, qui joue avec bien plus de talent du côte tartignole de ses personnages. Même Justin Timberlake, qui nous avait déjà fait le coup du contre-emploi dans le plus qu'oubliable Love gourou, semble ne pas trouver le ton adéquat. Seul un Jason Segel affûté et rigolard apporte sufifsamment de distance pour tenir la dragée haute à une Cameron Diaz il est vrai plutôt en forme, qui trimbale ses longues jambes et ses pommettes mal refaites dans cette comédie poussive qui donne surtout envie de rentrer chez soi et de regarder School of rock pour la énième fois.



Bad teacher de Jake Kasdan. 1h33. Sortie : 27/07/2011.

2 août 2011

[CONCOURS] THE FUTURE : places, livres et affiches


Il FAUT voir The future, deuxième film de Miranda July, qui sort le 17 août dans toutes les bonnes salles de cinéma. Comme je l'ai beaucoup aimé, je souhaite vous faire profiter de quelques cadeaux liés à cette sortie. Je vous propose donc de gagner 5 x 2 places pour aller voir le film, ainsi que 5 affiches du film et 2 exemplaires d'Un bref instant de romantisme, recueil de nouvelles écrit par Miranda July. Pour participer, voici la marche à suivre :
  • il faut être fan de la page Facebook de ce blog,
  • et/ou suivre mon compte Twitter et avoir retweeté ce message,
  • puis me laisser un commentaire au bas de ce billet pour m'indiquer quel lot vous préférez (places / affiche / livre) en m'indiquant votre nom (si vous avez choisi l'option Facebook) et/ou votre pseudo Twitter (si vous avez choisi l'option Twitter) pour que je puisse vérifier cela.
Il est tout à fait permis de jouer par Twitter ET par Facebook, ce qui vous permettra de doubler vos chances au moment du tirage au sort effectué par Rob le chat...

Fin du concours le lundi 15 août à 18 heures. Bonne chance à tous.

BEGINNERS | THE FUTURE


Et pourquoi pas placer dos à dos — ou peut-être côte à côte — Beginners et The future, liés ne serait-ce que par la relation amoureuse qui unit leurs réalisateurs respectifs, à savoir Mike Mills (Âge difficile obscur) et Miranda July (Moi, toi et tous les autres). Une convergence pas si artificielle puisque tous deux livrent un cinéma terriblement personnel, repoussant assez loin les limites de l'intime, et où la notion de couple est fortement mise en avant.

Dans Beginners, le héros joué par Ewan McGregor assiste à l'implosion de ses certitudes : à 75 ans, son père effectua en effet son coming out après avoir tu son homosexualité pendant toute sa vie. Le film suit Oliver, artiste de talent, à deux moments de son existence : quelques mois avant le décès du fameux paternel, rongé par un cancer mais bien décidé à profiter de sa nouvelle vie jusqu'au bout, et après le décès de celui-ci, au moment même de sa rencontre avec Anna, une française indépendante et libre comme l'air.

Dans The future, l'héroïne (July elle-même) et son compagnon disposent d'un dernier mois rien qu'à deux avant de recueillir Paw Paw, un chat abandonné et souffrant. Ces trente jours sont pour eux la dernière occasion d'accomplir des choses véritablement importantes avant de ne plus en avoir la possibilité.

Chacun des deux films, à sa manière, joue la carte du compte à rebours et fait du temps un ennemi pas tout à fait malfaisant, qui vous accule pour mieux vous contraindre à crier qui vous êtes réellement. Le brutal changement de vie du vieil Hal dans Beginners rejoint le besoin qu'éprouvent les Sophie et Jason de The future de se trouver enfin. Les personnages semblent stimulés par le couperet qui s'apprête à s'abattre sur eux, même si la concrétisation semble plus sereine chez Hal, pourtant à deux doigts de s'éteindre, que chez Sophie et Jason, qui semblent avoir encore toute la vie devant eux.

Il y a aussi cette fascination pas si innocente pour les animaux qui parlent. Dans Beginners, le chien Arthur n'hésite pas à exprimer ses sentiments à Oliver, ceux-ci étant tout simplement retranscrits à l'aide de sous-titres. Très concerné par l'histoire qui naît entre son nouveau maître et l'intrigante Anna, il semble bien décidé à ne pas laisser Oliver (Ewan McGregor, grandiose) répéter les erreurs du passé. Qu'on se rassure, il ne s'agit pas d'un chien magique façon Chihuahua de Beverly Hills, capable de prendre réellement les choses en main pour arriver à ses fins : Arthur n'est là que pour apporter un point de vue légèrement différent sur les événements qui se déroulent sous ses yeux. Dans The future, c'est en voix off que le chat Paw Paw (dont on ne voit généralement que les deux grosses pattes avant) raconte les trente journées qui le séparent de son arrivée programmée chez Sophie et Jason. Miranda July prête ses drôles de cordes vocales à l'animal, dont l'utilisation semble moins futile que chez Mills : il s'agit là encore d'expliciter l'étrange relation de la cinéaste avec la notion de temps qui passe. Dilatées, distordues, les heures semblent se succéder sans souci de cohérence ou d'égalité. Au fond de sa cage, avec pour seul point de vue l'horloge du cabinet vétérinaire, Paw Paw a de quoi sombrer dans la dépression.

Et puis il y a cette vision du couple. Menant des carrières d'artistes polyvalents et indépendants, July et Mills expriment tous les deux leur incapacité de vivre un amour fusionnel dont ils semblent pourtant avoir très envie. Dans Beginners, cela se traduit par la bougeotte permanente du personnage d'Anna (Mélanie Laurent, très bien), qui va d'hôtel en hôtel et de ville en ville pour fuir cette stabilité qui l'effraie tant. Pas sûr que cette façon de voir les choses soit très neuve, même si les choses ont le mérite d'être claires. Dans The future, cette fêlure conjugale se ressent de façon bien plus viscérale, non seulement au niveau du style — un mur de glace semble séparer Sophie et Jason, et ce dès leur première apparition devant la caméra, sur un canapé pourtant censé les rapprocher —, mais également sur un plan narratif. Très vite, Sophie semble en effet opérer un glissement qui l'éloigne du cercle intime pour la pousser dans les bras de Marshall, père de famille plus âgé qu'elle et dont on peine à percevoir le charme. Comme s'il fallait trouver n'importe quel moyen de fuir toute forme d'engagement durable. La beauté de The future, c'est que tout ceci ne s'effectue pas à la façon d'une bête comédie de moeurs, puisque Richard Kelly et David Lynch semblent s'être invités à la fête. L'étrangeté malsaine de la relation de Sophie et Marshall et son côté potentiellement onirique ont de quoi perturber sacrément.

C'est là, dans le style et la façon de raconter, que Mike Mills et Miranda July ne semblent plus tout à fait sur la même longueur d'onde. Lui opte pour un dispositif résolument classique, celui d'une comédie dramatique indépendante qui nous propose de côtoyer de façon fort éphémère quelques personnages attachants pendant une heure quarante-quatre. Elle prend des risques parfaitement inconsidérés, quitte à semer une partie de son auditoire ou à se planter de temps à autres, en triturant le temps et l'espace jusqu'à offrir une vision ô combien déstabilisante et déprimante du couple des années 2000. Mills, dont l'histoire est très largement autobiographique, voudrait nous faire entrer dans son intimité, rendre ses protagonistes familiers, nous mettre le nez dans sa propre vie, mais il y échoue en partie. D'abord par excès de pudeur, ensuite parce que ces gens-là sont trop beaux et trop riches pour qu'il soit réellement possible de s'identifier à eux et à leurs petits soucis quotidiens. En revanche, July ne cache à aucun moment la peur panique qui la prend dès qu'il est temps pour elle de se mettre à nu, ce qui rend d'autant plus touchant la façon dont elle finit par le faire. Soubresauts narratifs, plongées métaphysiques et étrangetés visuelles sont là, jusqu'à une scène bouleversante de chorégraphie dans laquelle son corps et son esprit semblent enfin s'abandonner.

Beginners :

The future :


Beginners de Mike Mills. 1h44. Sortie : 15/06/2011.
The future de Miranda July. 1h31. Sortie : 17/08/2011.
Bientôt : une interview de Miranda July à retrouver ici.

31 juil. 2011

LE MOINE

En 2000, Dominik Moll frappait un grand coup avec le chef d'oeuvre Harry, un ami qui vous veut du bien, thriller intimiste témoignant d'une véritable fascination pour le Mal, la création, l'éthique familiale, amicale et amoureuse. Après un Lemming reprenant, sous une autre forme, des thèmes sensiblement voisins, Moll nous revient enfin avec ce Moine ô combien attendu car adapté d'un roman extrêmement réputé de Matthew Gregory Lewis. Publié en 1796, le roman fit très rapidement scandale, notamment parce qu'il mêlait des thèmes d'ordre religieux à des réflexions beaucoup pus ésotériques et surtout à des sujets aussi polémiques que l'inceste. Aujourd'hui encore, le contenu du roman de Lewis devoir être pris avec des pincettes : sa vision de la passion, de la foi et de l'abandon de soi a en effet de quoi faire grincer les dents de plus d'un croyant, en particulier du côté des extrémistes les plus fervents.

Le fameux moine du titre se nomme Ambrosio, homme robuste et charismatique abandonné à la naissance devant la porte d'un couvent, et dont les prêches pleins de conviction et de vérité semblent être à même de réunir les croyants autour d'un message assez fort pour les rendre meilleurs. La perte d'Ambrosio viendra de son rapport aux femmes, les différentes demoiselles qu'il sera contraint de côtoyer pour des raisons diverses présentant toutes une raison ou une particularité le poussant du côté obscur. Celui du désir, de la chair et du Mal. Pourra-t-on véritablement parler de perte ? Rien n'est moins sûr, car comme dans nombre de récits religieux, la fin d'un être coïncide toujours avec l'éveil d'un autre, dans un système cyclique et spiralé qui a de quoi inspirer le vertige.

Aussi académique dans ses cadrages dignes de téléfilms de luxe que fantaisiste dans le choix de ses effets de style (un appareillage gothique et rococo dont on comprend l'intérêt mais qui a parfois de quoi faire pouffer), Le moine est un film plus qu'imparfait, mais c'est au moins un film qui se tient, avec du sens, du coffre, et une véritable cohérence narrative et stylistique. Démarrant de façon assez catastrophique (à moins que le spectateur n'ait tout simplement besoin d'un peu de temps pour se faire à cet univers), le film ne fait que se bonifier à mesure que l'apparente stabilité d'Ambrosio semble devoir s'évaporer. Refusant toujours le manichéisme, Moll fait preuve d'une absolue malice pour dépeindre l'ambiguïté absolue qui caractérise le personnage, qui semble tiraillé entre plusieurs passions, plusieurs destinées, et finit par se rendre compte que toutes le mèneront dans ses propres limbes. Plus Ambrosio s'abandonne aux ténèbres, plus Vincent Cassel se fait intense, et plus le film est beau. La conclusion, dont l'esthétique rappelle de façon frappante l'ouverture d'Essential killing, fait preuve d'un imposant sens du tragique et du mystique. Si son film est loin d'être pleinement convaincant, Dominik Moll ne cesse pas pour autant d'être l'un des cinéastes les plus fascinants de France par la façon dont il aime à s'enfoncer dans les tréfonds de l'âme humaine.




Le moine de Dominik Moll. 1h41. Sortie : 13/07/2011.

30 juil. 2011

[reprise] DEEP END

Honoré par plusieurs festivals au cours des derniers mois, Jerzy Skolimowski semble toujours aussi insaisissable. Sa filmographie de haute volée, caractérisée par des migrations géographiques et des silences incroyablement longs, peine en effet à être réduite à quelques lignes directrices, quelques thèmes communs qui permettraient sans doute de mieux saisir le personnage. La ressortie de Deep end, quarante ans après sa première présentation au public, permet néanmoins d'effectuer quelques ponts entre sa filmographie passée et sa seconde carrière entamée en 2008 avec Quatre nuits avec Anna. Il s'agit dans les deux oeuvres de disséquer une fascination, celle entretenue en secret par un jeune home à l'égard d'une femme dont le magnétisme n'est plus à prouver.

Dans Deep end, le jeune homme en question se nomme Mike, qui trouve un petit job dans une piscine londonienne après avoir quitté les études de faon très prématurée. Il trouve sur sa route l'intrigante Susan, rouquine tellement consciente de ses charmes qu'elle n'hésite pas à monnayer ses services aux messieurs fréquentant les lieux. Une collègue dont la désinvolture apparente n'est poussée à l'extrême que pour mieux aguicher les hommes. Ce qui devait arriver arrive : l'adolescent timoré confond sentiments, désir et pulsions sexuelles, et sombre rapidement dans un comportement déraisonné et sanguin, celui d'un mari jaloux et violent. Incapable de supporter que l'élue de son coeur et de ses gonades puisse être convoitée (voire davantage) par d'autres que lui, refusant d'admettre qu'il n'a aucun droit sur elle, Mike fonce droit dans le mur de la folie et oublie trop vite qu'il n'a que 15 ans.

Le film de Skolimowski repose en grande partie sur la fantaisie de son ton, communiquée avec aisance par les deux acteurs principaux : John Moulder-Brown (dont la carrière se poursuit) livre une prestation pétaradante et décalée que n'aurait pas renié Jean-Pierre Léaud ; quand à Jane Asher (désormais spéclaisée dans les séries TV britanniques), elle rend parfaitement plausible l'état d'hypnose dans lequel elle semble plonger les mâles qui la croisent. Que Mike transporte avec lui une silhouette cartonnée sur laquelle il croit reconnaître Susan, ou qu'il transporte avec elle de grandes quantités de neige pour y retrouver un simple diamant, on adhère sans sourciller. De fait, la rapidité exponentielle avec laquelle la relation Mike-Susan s'intensifie est crédible et emballante, notamment parce que les deux personnages assument leur grain de folie. Coloré, confirmant le talent pictural de Skolimowski (ah, ce générique et cette scène finale), le film ne manque finalement que d'un peu de tripes : son côté teen movie semble en effet avoir contraint le cinéaste à rester à hauteur d'adolescent. Si bien que malgré son passage chez une prostituée plâtrée jusqu'en haut de la cuisse ou dans un cinéma moyennement fréquentable, Mike semble étonnamment épargné par le désir, le vrai, moite et turgescent à la fois. Une tendance qui semble s'inverser au moment de la conclusion, mais celle-ci a hélas de quoi décevoir en s'abandonnant un peu trop facilement aux sirènes de la fin-choc. De quoi gâcher un rien la fête que constitue cette formidable ressortie d'été.



Deep end de Jerzy Skolimowski. 1h30. Sortie : 15/12/1971. Ressortie : 13/07/2011.

I'M STILL HERE

Le cas Joaquin Phoenix a longtemps fasciné les médias, les cinéphiles et les amateurs de tabloids. Impossible de croire sincèrement à la retraite cinématographique de ce fabuleux comédien, qui annonçait en 2008 sa décision de tout plaquer pour se consacrer au hip-hop. Impossible, et pourtant le doute a longtemps subsisté. S'il est désormais établi que tout cela n'était qu'un gigantesque canular destiné à tourner le film dont il est question ici, l'écheveau savamment noué par Phoenix et son beauf Casey Affleck a mis du temps à être démêlé. On avait du mal à gober cette histoire, mais l'aplomb total de l'acteur, apparemment bien décidé à saccager sa carrière, a permis à cette gigantesque entreprise d'affabulation de perdurer aussi longtemps que possible. Il a fallu en fait que I'm still here soit enfin montré au public, puis que Phoenix annonce l'air de rien ses prochains projets ciné, pour que la vérité jaillisse de façon certaine. Ce qui rend le film encore plus passionnant, celui-ci possédant un grand nombre de niveaux de lecture.

Car I'm still here est loin d'être un film de simple petit malin, du genre « regardez comme on s'est bien moqués de vous ». Récit chronologique et méthodique de l'année au cours de laquelle Phoenix amorça (en apparence) son changement de vie, le film n'inclut jamais son propre making of. Autrement dit, l'un des choix essentiels pris par Casey Affleck est de livrer un pur doc sur cette reconversion surprise, comme si elle était "vraie", et pas de disséquer la genèse et les coulisses de cette hallucinante opération de duperie. À une poignée de détails près, on pourrait y croire totalement. Ce premier degré parfaitement assumé est essentiel et assure au film solidité, longévité ainsi qu'une dimension supérieure. Il opère en effet une jonction rarement vue (et en tous points passionnante) entre le genre documentaire et la fiction. En effet, si Phoenix et les rares membres de sa bande savent bien qu'ils sont en train de "jouer" (même si à ce degré d'implication il n'est plus question d'un simple jeu), le reste du monde l'ignore, et agit donc face caméra avec le naturel le plus total. Comment rendre plus crédible, plus palpable, l'histoire préécrite d'un artiste en or décidant un jour de changer de registre et se heurtant soudain à l'incompréhension générale ? Le même récit en mode fictionnel aurait forcément été moins fort par manque d'ancrage dans le réel.

Le plus fort, c'est que bien que le pot aux roses ait été découvert depuis longtemps, I'm still here continue à fonctionner même en le regardant sans cynisme. Le personnage que s'est créé Joaquin Phoenix est un monument de fragilité, de faiblesse, de désorientation, qui s'enlise dans une médiocrité de plus en plus inextricable et s'éloigne à vitesse grand V de la vie dorée dans laquelle il ne s'épanouissait plus, et ce malgré les acclamations des professionnels et du public. Tout quitter pour tenter de se retrouver enfin : c'est l'un des thèmes ô combien sérieux du film, qui ridiculise régulièrement son anti-héros mais le fait avec une moquerie teintée de compassion. Humilié par David Letterman devant des millions d'américains puis par P. Diddy dans un studio d'enregistrement désert, Phoenix semble comprendre assez rapidement qu'il s'est fourvoyé. Mais il décide de persévérer coûte que coûte, et là est la beauté de la chose. I'm still here est l'un des plus beaux portraits de losers qu'il ait été donné de voir sur grand écran. Et cela finit par devenir réellement émouvant.

Sous forme de mockumentary, il aurait sans doute été hilarant, et seulement hilarant ; or I'm still here va bien plus loin que cela. C'est un film magnifique, qui compense ses rares écarts (une scène où l'acteur se fait déféquer dessus par un collaborateur mécontent, que l'on peut voir comme un gigantesque indice destiné à prouver la vraie teneur de l'ensemble) par des scènes d'une profondeur inouïe. L'épilogue et surtout le prologue du film, qui voient Joaquin Phoenix renouer avec la nature et entrer dans une communion mystique que n'aurait pas renié le Gus van Sant de Last days. C'est comme si le Blake joué par Michael Pitt s'était soudain réincarné ici. Le voir s'enfoncer dans la végétation comme s'il souhaitait atteindre enfin le point de non-retour a de quoi donner la chair de poule. Cet objet incroyable et unique, loin d'être une facétie boratienne ou un vague crachat nombriliste, n'a pas fini de faire tourner les têtes.



I'm still here de Casey Affleck. 1h48. Sortie : 13/07/2011.

28 juil. 2011

LA MUJER SIN PIANO

À presque 50 ans, Rosa mène une existence médiocre entre son mari, qui ne se soucie que de ce qu'elle compte lui cuisiner, et son passionnant job consistant à épiler au laser des clientes manifestement plus aisées qu'elle. La mujer sin piano se penche tout particulièrement sur la nuit où Rosa, excédée mais toujours aussi calme, profite du sommeil de son époux pour faire sa valise et se faire la malle. Pour aller où ? n'importe où sauf ici. Très bien. Très bien.

Le film de Javier Rebollo est une sorte de road movie immobile, qui suit Rosa dans ses vaines tentatives pour s'éloigner de sa vie pourrie. On comprend très vite le principe de l'ensemble : pas aidée par des institutions sans coeur et d'évidentes prédispositions pour la poisse, Rosa ne parviendra jamais à concrétiser sa folle envie de tout plaquer. Un message éminemment déprimant, mais qui aurait pu donner lieu à un long-métrage d'excellente facture si le cinéaste ne se montrait pas aussi lourd dans son illustration. Téléphoné dans son déroulement, usant et abusant d'un symbolisme éculé, le film ne crée rien d'autres qu'une consternation polie.

Refoulée au guichet de la Poste en raison d'une pièce d'identité invalide, dans l'incapacité d'aller aux toilettes à cause des agents d'entretien, interdite de fumer par des lois répressives, Rosa est victimisée à chaque seconde, comme si les conventions sociales et les règles en vigueur étaient seules responsables de sa vie ratée. Et si les acouphènes dont elle est victime sont supposées la rendre encore plus humaine, encore plus digne d'obtenir notre compassion, il n'en est rien : le film n'impose ni le rythme nécessaire ni une intensité suffisante pour permettre de s'identifier et de la prendre en pitié.

Comme dans tout road movie, le parcours de Rosa est jalonné par des rencontres : Rosa croisera en particulier un réparateur polonais en fuite, avant tout intéressé par la bouffe et les appareils électriques. Imperméable à sa détresse, illuminé et légèrement obsessionnel, l'homme n'a d'autre intérêt pour Rebollo que celui d'enfoncer encore un peu plus l'héroïne dans une incommunicabilité édifiante. Le personnage n'est qu'un pion, un symbole de plus, comme tous les autres objets auxquels le réalisateur a recours.

Un tableau qu'on décroche puis qu'on raccroche, un téléphone portable dirigeant tous les appels de Rosa vers une messagerie désespérante, un piano destiné à montrer que cette femme-là n'est pas sans talent : chaque élément du film souffre d'un grave problème de dosage, puisque tout y est soit surligné mille fois, soit absolument sans signification. La mujer sin piano ressemble au film d'un ado qui aurait visionné et mal digéré de nombreux films d'auteur avant d'en recracher maladroitement les tics les plus grossiers. Le cinéma espagnol vaut sans doute mieux que ça.



La mujer sin piano de Javier Rebollo. 1h35. Sortie : 13/07/2011.

27 juil. 2011

THE MURDERER

C'est l'histoire d'un cinéma coréen rattrapé par un autre. The murderer, deuxième long de Na Hong-jin après The chaser, est le parfait et passionnant symbole de ce qui se trame actuellement dans le cinéma coréen (en tout cas dans celui qu'il nous est permis de voir sur les écrans français) : deux tendances divergentes cohabitent et finissent parfois par se télescoper, de façon plus ou moins heureuse. Les deux tendances en question peuvent se résumer ainsi : il y a la frange délicate, où une écriture ciselée n'empêche pas les sentiments les plus forts (ou les plus monstrueux) d'affleurer ; et il y a la frange brutale, où l'intensité semble devoir se mesurer en fonction du nombre de litres de fausse hémoglobine déversés face caméra.

Pendant près d'une heure et demie, The murderer se veut un brillant défenseur de la frange délicate de ce cinéma si riche. L'écriture est sèche et maligne, la tension permanente, et la perversité de la situation n'échappe à personne. C'est l'histoire d'un joseonjok, terme désignant les 800.000 sino-coréens vivant dans la ville chinoise de Yanji, coincée entre la Corée du Nord et la Russie. Criblé de dettes, il est contraint d'accepter un contrat à l'aveugle : passer la frontière coréenne pour tuer un homme dont il ne connaît que le nom et l'adresse. Les fantômes du héros ne cesseront de le hanter, non seulement parce qu'il n'est pas le genre de type qui tue sans raison , mais également parce que sa femme s'est tirée en Corée quelques mois plus tôt pour le boulot et n'a plus donné de nouvelles par la suite. Interprété magistralement par Ha Jung-woo, le pauvre Gu-nam passe alors des jours et des nuits devant l'immeuble de sa cible, ressassant un plan que l'on devine approximatif, et mangeant des saucisses sur des brochettes comme pour se donner une contenance. Si sa mise en scène n'est pas toujours éblouissante, Na Hong-jin fait preuve dans cette première moitié d'un joli sens de l'espace, d'une vraie conscience politique et surtout d'une maîtrise aiguë des silences et de leur signification. Souvent seul devant la caméra, désemparé dans un pays qu'il ne connaît pas et qui ne veut pas de lui, le personnage principal s'enferme dans un mutisme qui nous terrasse.

Le film s'articule autour d'une longue séquence jouant réellement le rôle de pivot, puisqu'elle va à la fois bouleverser tous les enjeux précédemment mis en place, mais également influer sur le style de l'heure restante. Se déroulant à l'instant même où Gu-nam décide enfin de passer à l'acte, elle mêle une belle surprise scénaristique, une scène d'action violente en diable, et une course-poursuite effrénée qui n'a pas fini de servir de modèle aux cinéastes du monde entier. Somptueuse... mais fatale. Car peu après, The murderer finit par basculer doucement mais sûrement dans la fameuse frange brutale présentée plus haut. L'évolution de l'intrigue explique en partie ce basculement, puisqu'il est à présent question pour des personnages aux motivations opposées de chercher à avoir le dessus sur les autres. Une guerre des clans dans laquelle certains clans sont composés d'une seule personne, déterminée à aller jusqu'au bout de ses capacités physiques et mentales pour s'en sortir. En bref, un jeu de massacre pervers et parfois jouissif, mais qui fait perdre au film l'inquiétante beauté qui le faisait tant briller jusque là. Symbole de ce changement de cap, Gu-nam finit même par passer au second plan, éclipsé par un certain Myun, mafieux charismatique et ultra-violent, qu'on se régale à regarder évoluer tout en se demandant s'il ne s'est pas trompé de film. Heureusement, Na Hong-jin connaît les limites de ce système et ne dépasse quasiment jamais la ligne blanche, même s'il faut regretter la présence de quelques images du genre "gros plan sur une hache qu'on sort doucement du crâne d'une victime".

L'oeuvre magistrale entrevue en début de métrage laisse donc place à un thriller honnête, efficace, bien mené jusqu'à son terme, mais qui tend hélas à s'éparpiller en multipliant les protagonistes et les enjeux là où on aurait aimé pouvoir continuer à suivre le fameux meurtrier du titre français. Le film s'achève même en demi-teinte, comme sur les rotules, au gré d'une conclusion un peu plate et surtout déjà vue. Le contexte géopolitique saisissant et l'effroi palpable du vibrant Gu-nam semblent avoir été jetés aux orties en cours de route sous l'effet du manque d'inspiration ou d'influences néfastes. Il n'empêche que ce Murderer demeure bien plus profond que les récents monuments de vacuité qui nous ont été envoyés de Corée, de Breathless à J'ai rencontré le diable...



The murderer (The yellow sea / Hwanghae) de Na Hong-jin. 2h20. Sortie : 20/07/2011.

26 juil. 2011

[DVD] 2 films de Jacques Audiard | 2 films de Cristian Mungiu | France Inter

Après notamment Xavier Beauvois et Ken Loach, c'est au tour de Jacques Audiard et Cristian Mungiu d'être à l'honneur de la collection DVD 2 films de... initiée par France Inter. Deux doubles programmes hétéroclites mais quoi qu'il en soit nécessaires.

Pour Jacques Audiard, tout a commencé avec Regarde les hommes tomber, premier film venu de nulle part qui lui a permis de se faire un prénom en un clin d'oeil. L'un des fabuleux atouts de ce joyau est sa narration ultra-moderne, Audiard étant l'un des très rares cinéastes français capables de retrouver le ton des meilleurs romans noirs américains. Seul le Corneau de Série noire semble en fait l'avoir devancé... L'autre immense qualité du film, c'est son casting impressionnant, avec sa triplette d'interprètes que l'on n'aurait jamais imaginés ensemble. La classe très sèche du grand Jean-Louis Trintignant, dans l'un de ses derniers rôles importants sur grand écran, s'allie idéalement à la fragile innocence du petit Mathieu Kassovitz, tout le temps en train de bouffer, et dont le naturel laisse pantois. Quant à Jean Yanne, qui évolue en parallèle dans un registre éminemment douloureux, il rappelle son immense potentiel d'acteur, trop peu exploité si ce n'est par Pialat et Chabrol. La mécanique du film est parfaitement huilée mais tolère les micro-incidents, qui lui confèrent une incroyable humanité. Tendu de part en part, stressant comme un thriller mais poignant comme un drame, Regarde les hommes tomber reste le meilleur film d'un Audiard pas encore conscient de son propre talent.


Cinq ans après le fameux Un héros très discret, dans lequel il retrouvait Kasso dans le rôle d'un mythomane professionnel, Jacques Audiard revient avec Sur mes lèvres, film qui accroît subitement sa popularité auprès du public. Paradoxalement, il s'agit pourtant de son moins bon film, amorçant un glissement regrettable (mais pas dramatique) vers un cinéma trop calculé, trop soucieux d'être magistral, trop conscient de ses effets. Techniquement, comme ce fut le cas ensuite pour De battre mon coeur s'est arrêté et Un prophète, c'est parfait. La photographie est archi travaillée, le jeu sur le son poussé à son paroxysme (le personnage joué par Emmanuelle Devos est malentendant), les prestations des acteurs réglées au millimètre (Devos piqua d'ailleurs le César promis à Audrey "Amélie" Tautou)... Résultat : pas une once d'oxygène ou d'imprévu, pas la moindre faille, rien qui différencie ces héros-là de simples robots. Quant à l'intrigue, bâtie par Audiard et Tonino Benacquista, elle traîne souvent des pieds, à tel point que le climax tant attendu ne prend pas vraiment. Sur mes lèvres est un film propre, dans le bon sens du terme comme dans le moins bon, mais c'est surtout le symbole de la fin d'un grand cinéaste, qui laissa ensuite place à un professionnel ultra doué mais sans âme.



Regarde les hommes tomber de Jacques Audiard. 1h50. Sortie : 31/08/1994.
Sur mes lèvres de Jacques Audiard. 1h55. Sortie : 17/10/2001.








En mai 2007, un jeune cinéaste roumain fait imploser la Croisette et le jury de Stephen Frears, qui lui décerne une Palme d'Or approuvée par la majorité des festivaliers : avec 4 mois, 3 semaines, 2 jours, Cristian Mungiu réussit son entrée par la grande porte... bien que son film soit un puits de vacuité sans fond, un monument de provocation gratuite et de faux bon cinéma d'auteur. Racoleur, complaisant et plus poseur que jamais, le film surexploite son sujet principal (l'avortement clandestin) pour jouer avec les nerfs du spectateur et lui mettre le nez dans la misère des personnages sans lui donner le droit de prendre de la distance. Faut-il vraiment servir un foetus mort sur un plateau pour choquer ou éveiller les consciences ? Pas sûr. Mais la relative maestria technique du roumain aura eu raison de bien des pigeons. Cette Palme 2007 fut une mauvaise nouvelle pour le cinéma d'auteur en général, et pour le cinéma roumain (plutôt en forme depuis le début du siècle) en particulier.


Curieusement, Mungiu revient à Cannes deux ans plus tard, mais de façon plus que discrète puisqu'il débarque à Un Certain Regard avec un film à sketches ouvertement comique, réalisé avec d'autres réalisateurs roumains. Loin du provoc 4 mois..., Contes de l'âge d'or est un film modeste mais chaleureux, qui brocarde avec tendresse mais sans pitié le système Ceaucescu. Hypocrisie, propagande, manipulation et excès en tous genres ont fait de cet Âge d'Or un moment passablement désagréable pour une Roumanie transformée en vrai petit théâtre absurde. Ce que les 4 sketches proposés ne manquent pas de rappeler. Sorti en France fin 2009, ce film tordant et édifiant (dont la critique complète est à retrouver ici) fut suivi d'une deuxième partie sortie en juillet 2010 (critique ici), presque aussi savoureuse et toujours dirigée par un Mungiu apparemment pas pressé de nous livrer son deuxième long-métrage.



4 mois, 3 semaines, 2 jours (4 luni, 3 saptamini si 2 zile) de Cristian Mungiu. 1h53. Sortie : 29/08/2007.
Contes de l'âge d'or (Amintiri din Epoca de Aur) de Cristian Mungiu, Ioana Uricaru, Hanno Höfer, Rãzvan Mãrculescu et Constantin Popescu. 1h20. Sortie : 30/12/2009.
 
"Bienvenue au royaume du pisse-froid inculte qui est au cinéma ce que Philippe Manoeuvre est au rock" (© Trollman)
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