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10 avr. 2009

CHÉRI

On sait Stephen Frears fasciné par les films d'époque, le britannique ayant brillé dans ce domaine par le passé. Cette adaptation de Colette, avec en tête d'affiche une Michelle Pfeiffer sortie d'une mauvaise passe, avait donc quelque chose d'alléchant. Problème : en dépit du sérieux de son sujet, Chéri ressemble davantage à Madame Henderson présente qu'aux Liaisons dangereuses, confirmant l'inconstance d'un cinéaste trop touche à tout pour être cohérent. Retrouvant Christopher Hampton, scénariste des Liaisons, il accouche d'un tout petit drame, léché mais empesé, qui peine à transcender l'emprise de la passion qui étreint les deux héros.
Avec sa voix off faussement authentique et les gloussements perpétuels de ses personnages féminins, Chéri ressemble dès le début à une farce, alors que l'objectif est pourtant de décrire un amour tragique et déchirant. L'explication est toute simple : bien que de facture classique, le film semble étouffer sous les désirs de modernité de son réalisateur, qui aimerait parler à la fois aux lectrices de Colette et aux ados peu rompus à ce genre de cinéma. La construction du film et les raccourcis employés en sont une autre preuve. Après avoir bruyamment (et brièvement) mis en scène la naissance et l'idylle de ceux qui se surnomment Nounoune (en français dans le texte) et Chéri, Frears nous plonge dans des abîmes de perplexité lorsqu'il filme l'après rupture. Bon nombre de comédies romantiques, juste avant les retrouvailles finales et heureuses, montrent les deux amants, chacun de son côté, séparés par un malentendu ou un désaccord, la plupart dans un montage parallèle et musical. C'est exactement ce que fait Frears, mais sur une durée de trois quarts d'heure. De quoi donner envie de s'arracher les cheveux.
Quand ont finalement lieu les retrouvailles, c'est pour nous abreuver d'un dialogue assez pompeux sur le désir, le mérite et l'âge, provoquant un très mince regain d'intérêt pour une histoire extrêmement prévisible. L'ensemble se veut grave et cruel, mais seules les intentions apparaissent à l'écran. Fort heureusement, Michelle Pfeiffer est excellente dans la peau de l'ex courtisane vieillissante, son visage remodelé constituant un étrange atout pour le rôle. Face à elle, Rupert Friend est une petite révélation en dandy fantomatique, comme une sorte d'orlando Bloom avec du charisme. C'est pour eux, et uniquement pour eux, que l'on peut se frotter à ce Chéri bien pataud, où l'on peine à retrouver celui qui nous offrit jadis My beautiful laundrette ou High fidelity.
4/10
(également publié sur Écran Large)

(autre critique sur Nightswimming)

25 janv. 2009

LES NOCES REBELLES

Dieu qu'il est édifiant, le titre original des Noces rebelles. Revolutionary road désigne le quartier dans lequel s'installe le couple Wheeler, qui sombre peu à peu dans une routine bien éloignée de l'existence tout sauf ordinaire qu'il s'était promis de mener. Le film de Sam Mendes dépeint la frontière intangible qui se dresse entre la norme et la marge, condamnant des gens ambitieux à ne faire qu'exister alors qu'ils voulaient vivre.
Les thèmes sont passionnants, les intentions louables. Comme dans American beauty, Mendes égratigne l'american way of life, montrant qu'une vie idyllique ne se résume pas à un pavillon, du mobilier et des gosses. Seulement voilà : le scénariste Justin Haythe n'est pas Alan Ball, loin de là, et livre un script trop lourdement explicite pour réellement convaincre. Si Les noces rebelles évite quelques pièges didactiques comme celui de la voix off, il a tendance malgré tout à répéter chaque idée trois ou quatre fois, l'air de rien. Symbole de ce stabilotage en règle : les deux scènes dans lesquelles apparaît le toujours fabuleux Michael Shannon, dans le rôle si pratique du "fou qui apporte la vérité", et dont le seul intérêt sera finalement d'expliquer au spectateur tout ce qui avait été plus ou moins sous-entendu jusque là. D'où l'impression d'un film faussement implicite, qui veut jouer la carte de la finesse mais chausse régulièrement de bien gros sabots.
Bien aidé par deux acteurs juste grandioses (surtout elle), Mendes montre tout de même avec brio la lente dislocation d'un couple qui ne se sent pas à sa place, engoncé dans des conventions pas faites pour lui. Il y a là-dedans quelques partis pris assez judicieux, comme l'idée de faire des enfants du couple deux silhouettes fantomatiques, quasiment jamais sur le devant de la scène, comme s'ils n'avaient jamais leur mot à dire. Idée une nouvelle fois contrebalancée par des dialogues un peu empesés sur le thème de « pourquoi on fait des gosses », qui provoquent là encore une impression de redondance. Le problème des défauts du film, c'est qu'ils sont grossis à la loupe par la mise en scène d'un Mendes étonnamment scolaire. Que la photographie soit très classique n'est pas un problème ; ce qui perturbe et alourdit le film, c'est le côté ostentatoire du montage et des mouvements de caméra. Le surdécoupage des scènes (notamment au début) est si lisible que les intentions en deviennent transparentes, tout comme la modification progressive du filmage à mesure que le couple part à vau-l'eau. Image posée quand tout va bien, caméra portée quand ça se gâte : pour un film sur le rejet des conventions, c'est un comble.
Finalement, Les noces rebelles enfonce le clou encore davantage avec une succession de faux dénouements ne faisant qu'accentuer le caractère factice de sa quête de perversité à tout prix. Les dix dernières minutes sont de trop, chaque scène que l'on croit être la dernière laissant inexorablement place à la scène suivante, encore plus explicative, laissant toujours moins de place à l'imagination et à l'intelligence du spectateur. Pas revolutionary pour deux sous.
5/10

(autre critique sur Les critiques clunysiennes)

11 déc. 2008

LE JOUR OÙ LA TERRE S'ARRÊTA

Attention, ceci n'est pas un remake. C'est un sacrilège, un gigantesque foutage de gueule, un bon gros navet, mais certainement pas un remake. Du grand film de Robert Wise (qui doit, si je ne m'abuse et sans consulter mes fiches, dater de 1951), seuls restent les noms des personnages (un type nommé Klaatu, ça ne s'oublie pas) et une ébauche du héros (en résumé, un E.T. venu sur Terre pour sauver la planète). Tout le reste a été savamment concassé, broyé, puis amalgamé pour donner un blockbuster avec son lot d'explosions, d'effets spéciaux et de suspense. La matière, elle, a disparu, tout comme le style et le message. Mais cela ne gêne visiblement personne, et surtout pas Scott Derrickson : déjà auteur d'un nauséabond Exorcisme d'Emily Rose, le tâcheron remet le couvert et saute consciencieusement dans chaque piège offert par le sujet.
Il y aura donc une intro prétendument mystérieuse mais surtout inutile, une ritournelle sentimentalo-écolo sur le thème "l'être humain est irrattrapable mais on l'aime quand même", des scientifiques bouche bée devant des aberrations scientifiques qui n'étonnent qu'eux... Vaste programme pour cette centaine de minutes d'une inénarrable bêtise, qui recrache quelques-unes des scènes du film de Wise, mais dans le désordre (ainsi, c'est in extremis que le film justifiera son titre). Yeux vitreux et visage inexpressif, Keanu Reeves n'était sans doute pas le pire choix pour entrer dans la peau de Klaatu. Le pauvre fait ce qu'il peut, mais se retrouve rapidement contraint à débiter des banalités sur le destin de notre bonne vieille planète bleue et sur l'ambivalence du genre humain. Il n'est d'ailleurs pas aidé par une Jennifer Connelly confirmant son statut d'actrice caméléon : à chaque film, elle parvient à se mettre au niveau général. Ici, donc, elle est d'une mollesse à faire peur.
Ne jouant même pas la carte du suspense pourtant offerte sur un plateau, avec la lancinante question "Klaatu vient-il nous sauver ou nous exterminer ?", Derrickson se contente d'aligner de longues scènes bien ennuyeuses et de courtes séances de pure démonstration technique. Il s'amuse bien à réduire en poussière un stade ou un gros camion, effets qui seraient assez convaincants si l'on ne s'était pas désintéressé du film depuis bien longtemps. En revanche, ces sphères translucides façon The fountain du pauvre ou cet indestructible géant rappelant les colosses du défilé France 98 ont quelque chose de passablement risible, comme si le prétendu fond du film ne suffisait pas à déclencher l'hilarité et la consternation. Le jour où la Terre s'arrêtera de produire de tels films, elle aura déjà fait un grand pas vers un monde meilleur.
1/10
 
"Bienvenue au royaume du pisse-froid inculte qui est au cinéma ce que Philippe Manoeuvre est au rock" (© Trollman)
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