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16 sept. 2008

PARLEZ-MOI DE LA PLUIE

On les avait laissés sur un Comme une image un peu sinistre et moraliste jusqu’à plus soif ; Agnès Jaoui et Jean-Pierre Bacri nous reviennent avec ce Parlez-moi de la pluie à la fois plus drôle et moins démonstratif. Comme on ne change pas une recette qui a fait ses preuves, ils nous offrent un nouveau film choral aux nombreuses ramifications dont le thème majeur pourrait être ce que le personnage de Jamel Debbouze nomme « l’humiliation ordinaire ». Mais là où leur opus précédent alignait les scènes comme autant de paragraphes d’un discours trop pompeux et schématique, Parlez-moi de la pluie renoue avec la spécialité du duo, une sorte de comédie en demi-teinte, toujours profonde mais souvent légère.
Le film doit énormément à l’alchimie du tandem Bacri – Debbouze : le profonde amitié qui unit les deux acteurs à la ville se ressent fortement à l’écran, et donne lieu à un paquet de scènes assez imparables, dans lesquelles le premier se montre plus clownesque que jamais tandis que le second montre à ceux qui en doutaient qu’il sait faire autre chose que du Jamel. Leur entente, tout comme la prestation de l’actrice non–professionnelle Mimouna Hadji dans un rôle-clé, fait naître une émotion palpable, qui permet au film d’être plus qu’un Jaoui-Bacri de plus, avec dialogues bien troussés et morale à la clé. Parlez-moi de la pluie est sans doute leur film le plus humain.
La politique, l’héritage du passé, la culpabilité : de tels thèmes auraient pu donner lieu à un film donneur de leçons, qui s’oppose à tout mais ne propose rien. Renouant au contraire avec la finesse de leurs meilleurs scénarios, Bacri et Jaoui abordent ces sujets avec malice et les utilisent pour faire leur auto-critique, montrant explicitement qu’il est plus facile de refaire le monde depuis son fauteuil que de mettre la main à la pâte. Bien aidé par une flopée de seconds rôles brillants (Pascale Arbillot et Frédéric Pierrot en tête), Parlez-moi de la pluie apporte une jolie pierre à l’édifice.
8/10
(également publié sur Écran Large)

20 mars 2008

IL Y A LONGTEMPS QUE JE T'AIME

Dramatique. C'est l'adjectif parfait pour décrire Il y a longtemps que je t'aime, première réalisation de Philippe Claudel, écrivain paraît-il fréquentable. Évitons toute incompréhension : le drame, c'est le film lui-même, condensé de ce que le cinéma français peut faire de pire. Un mélodrame pachydermique et faussement digne, qui tente de dissimuler sous des dessous auteuristes ses envies de terrorisme émotionnel. Il y a longtemps que je t'aime raconte les retrouvailles de deux soeurs, dont l'une vient de passer quinze ans en prison suite à un drame un peu mystérieux et forcément sordide. On n'en parlera clairement qu'en toute fin de film, Claudel ayant auparavant déroulé un suspense putassier et un flot ininterrompu de stéréotypes.
Quand un auteur souhaite jouer avec les non-dits, et les silences qui en disent long, il a intérêt à savoir s'y prendre. Ici, même l'implicite nous est asséné avec un manque de finesse qu'on croyait réservé aux téléfilms de nos pires chaînes hertziennes. Chaque phrase, chaque virgule est surlignée dix fois au fluo, et si les personnages ne disent rien, ils le disent avec un constant air de chien battu. Le moindre sous-entendu est répété dix fois pour être bien sûr que la ménagère de plus ou moins cinquante ans comprenne de quoi il retourne, et l'on a l'impression à chaque fin de scène d'entendre Claudel murmurer "vous voyez ce que je veux dire" pour bien insister sur l'aspect sursignifiant de ses dialogues.
Voilà un film qui, non content d'être terriblement ennuyeux (putain, deux heures), ne recule devant rien pour appâter le chaland. Il y a là-dedans un côté café du commerce qui met un peu plus en valeur la démagogie et le populisme de l'ensemble. La télévision, le foot, l'Irak, tous les thèmes un peu à la mode y passeront à un moment ou à un autre, et l'on s'étonne de ne rien entendre concernant la tektonik ou le mariage de l'omniprésident. Mais les thèmes majeurs du film sont plutôt à chercher du côté de la culpabilité, de la perte, de l'enfermement. Avec cette phrase qui résume tout, façon Hélène Segara : "la pire des prisons, c'est la mort d'un enfant". On en rirait presque si ce n'était asséné par une Kristin Scott-Thomas aussi épouvantable qu'elle a pu être brillante ailleurs, et plus mal filmée que jamais. Claudel multiplie les angles inutiles et les gros plans bien appuyés pour faire apparaître les comédons des personnages, et les révéler ainsi sous leur jour le plus cruellement humain. La connerie de ce film n'a pas de limites, ne cessant de croître de scène en scène, pour aller culminer lors de cette ultime scène de confession, où il s'avère évidemment que tout le monde il est beau et tout le monde il est gentil. Finesse, courage, matière, style : autant de mots qui flottent à mille lieues d'un film qui rappelle l'infâme Voleur de vie d'Yves Angelo. Dramatique.
1/10
 
"Bienvenue au royaume du pisse-froid inculte qui est au cinéma ce que Philippe Manoeuvre est au rock" (© Trollman)
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