Selon le bon vieux principe qui veut que toute personne ayant atteint un sommet ne peut que perdre de l'altitude ensuite, Gus Van Sant livre avec Paranoid Park un film un million de fois plus respectable que la moyenne, mais également mille fois moins transcendant que ses trois derniers longs. Et cela s'explique sans peine : si Van Sant n'a guère modifié sa façon de traiter un sujet (en l'effleurant, en restant en périphérie, en évitant les chocs frontaux), il a en revanche chamboulé sa mise en scène qui, si elle lui ressemble indéniablement, a perdu le magnétisme de Last days et compagnie. D'où une impression de décalage face à une forme un peu trop rentre-dedans par rapport à ce fond si délicat.
Reste que Van Sant est à la fois un formidable faiseur d'images et un très bon raconteur d'histoires. Sa manière de filmer le skate n'a rien de révolutionnaire, mais il est absolument le seul et unique à savoir filmer les couloirs des lycées et les djeunz à capuche. C'est dans ces moments-là, quand il embrasse le quotidien et les errements de ces quelques ados (et de son héros, le formidable Gabe Nevins), que le film se fait le plus convaincant. Côté scénar, la déconstruction chronologique de Paranoid Park n'est absolument pas faite pour décontenancer le spectateur ou tenter de ménager la moindre surprise, mais tout bonnement pour transformer chaque seconde de chaque vie en un poème déstructuré et salutaire. L'histoire simple du jeune Alex, c'est l'occasion pour le grand Gus d'explorer le monde de la culpabilité et de l'indifférence, tout en se livrant sur le tard à une analyse de sa condition de cinéaste : la bien belle morale de ce bien beau Paranoid Park est qu'il faut faire des films pour se débarrasser d'un fardeau plus que pour les soumettre à un public. Si celui-là n'est pas la plus mirrifique de sa magistrale filmographie, il aurait quand même été bien triste qu'il reste planqué au fond d'un tiroir.
8/10
DIAMANT BRUT
Il y a 1 jour
1 commentaire sur “PARANOID PARK”
Oh des libellés... Désolé pour le manque de réactivité mais je te lis toujours... Et puis le dernier film que j'ai vu c'est Stardust donc ça fait pas vraiment cinéphile...
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