17 nov. 2006

LE CONCILE DE PIERRE

On l'a dit maintes et maintes fois, mais il semble nécessaire de le répéter : on pense ce qu'on veut des romans de Jean-Christophe Grangé, mais il est absolument certain qu'ils n'ont pas leur place au cinéma. Après des Rivières pourpres assez moyennes, après un Empire des loups tout bonnement atroce, voici une troisième preuve à charge dans l'affaire Grangé. Bien que confié à Guillaume Nicloux, réalisateur pas toujours convaincant mais pas dénué d'un certain talent, Le concile de pierre est un ratage majeur, une abomination de première espèce qui laisse pantois.
Les intentions de Nicloux étaient pourtant louables : dégraisser le roman de ses tambours et trompettes pour n'en garder que l'essence, transformer un abracadabrant thriller de plage en un blockbuster d'auteur à forte teneur ésotérique, et injecter quelques grammes de sobriété dans un univers un peu grand guignol. Au départ, sa mise en scène feutrée donne ce qu'il faut de mystère sans s'abaisser à faire du grand spectacle (avec notamment un prologue silencieux du meilleur goût). Mais voici qu'apparaît Monica Bellucci, dont la prestation convainc une minute tout au plus. Les cheveux courts lui vont bien, mais la malheureuse débite son texte avec l'entrain d'un élève de CM2 déclamant du Paul Éluard. Autour d'elle, une galerie de personnages (mal) introduits au cours de trop nombreuses scènes d'exposition : en cinq minutes, on a parfaitement compris qui est méchant (ceux qui ont l'air gentil) et qui est un peu gentil (celui qui fronce les sourcils pour avoir l'air méchant). Après la demi-heure d'introduction, la demi-heure de montée en épingle. On a souvent pointé du doigt les adaptation de Grangé parce qu'elles étaient incompréhensibles (vu la complexité et le caractère invraisemblable des intrigues, c'est légitime). Pour y remédier, Nicloux prend bien son temps pour poser soigneusement les enjeux, à coups de longues scènes mal fagotées et de dialogues assommants. Si l'on se contrefout d'une histoire plutôt bien simplifiée mais totalement insipide (une môman adoptive au grand coeur cherche à sauver son fils enlevé par des vilains pour un sacrifice humain offrant l'immortalité), il est encore possible de se raccrocher à la mise en scène de Nicloux, qui a montré par le passé un vrai talent à capter des ambiances et à susciter le malaise.
Mais voilà qu'arrive la deuxième partie du film, une longue course-poursuite en Asie au cours de laquelle éclate une gigantesque conspiration sans intérêt. Parce que ses producteurs lui ont tapé sur l'épaule pour lui rappeler que "hé, coco, c'est quand même un blockbuster", Guillaume Nicloux tente de filmer à l'américaine, avec une telle absence de conviction qu'on a plus que jamais l'impression d'être dans un téléfilm à la française. Bellucci n'est pas plus crédible en mère dévouée qu'en Lara Croft, Catherine Deneuve se transforme en un ours vraiment très numérique avant de redevenir Catherine Deneuve, les fusillades à la con se multiplient, les méchants dévoilent le détail de leurs plans aux gentils avant de les buter (et puis, oh, zut, le gentil s'échappe), il y a même une scène de chamanisme (ou assimilé) pour faire plaisir aux lecteur de Géo, et un semblant de twist final pour ceux qui regrettent le Shyamalan d'antan... Et là, non, décidément, on ne peut plus cautionner ce Concile de pierre qui plonge aux confins du ridicule. Difficile de croire que Nicloux, metteur en scène réfléchi et sage comme pas deux, ait pu se satisfaire d'un scénario aussi vide et d'une telle escalade dans le n'importe quoi.
2/10

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