17 juil. 2006

VOL 93

Il suffit de dire 11 septembre, sans même préciser l'année, pour que tout le monde se mette à penser à feu le World Trade Center et aux milliers de victimes provoqués par les attentats de 2001. Même pas cinq ans après, Paul Greengrass est le premier cinéaste à faire un long métrage consacré au sujet (il y eut auparavant le laborieux canevas de films courts qu'est 11'09''01). Les Américains ont râlé : pas touche à notre douleur, trop tôt pour réveiller des souvenirs pas encore éteints et faire renaître des craintes qui n'ont jamais vraiment disparu.
Pourtant, les États-Unis devraient s'estimer heureux que le premier film consacré au 11 septembre 2001 ne soit pas un hymne patriotique musclé et braillard avec Schwarzie qui décalque tout le monde dans un avion. Et rendre grâce à Paul Greengrass, réalisateur anglais assez en vogue, qui offre un scénario intelligent, détaché et pas bourrin pour deux sous.
Dès le début, les jambes flageolent. On a beau se convaincre du contraire, tous les hommes et les femmes qui montent dans l'avion United 93 ne reverront jamais la terme ferme. Caractère terrible et irrémédiable qui renvoie une sensation totale d'impuissance : on ne peut qu'assister à leurs dernières heures sans pouvoir ni espérer ni les aider.
La très bonne idée de Greengrass, c'est qu'il n'en rajoute jamais. Pas besoin de pontifier ses "gentils" ni de crucifier ses "méchants". Inutile d'insister sur le pourquoi des attentats. Vol 93 est un pur drame, sans fioritures ni lourdeurs psychologiques. Personne n'est jugé : les terroristes sont des hommes comme les autres, juste beaucoup plus cons que la moyenne, et les passagers sont tous aussi héroïques les uns que les autres, de la petite vieille prostrée dans son siège au judoka téméraire.
Côté dramaturgie, c'est la même chanson. Pas besoin d'en rajouter : il y a dans les évènements eux-mêmes suffisamment de dramaturgie pour faire dix films. Alors Greengrass fait profil bas, et dissèque cliniquement, minute après minute, les mécanismes d'un drame humain.
Et la mise en scène, dans tout ça? Difficile de ne pas tourner en rond quand on passe deux heures entre un couloir d'avion et une tour de contrôle. Là, Greengrass retombe dans son petit péché mignon : sa caméra tremblote plus que de raison, et on est parfois à la limite du perceptible. Traitement âpre et cahotique, mais qui restitue à merveille l'état d'esprit des personnages.
La révolte finale est un véritable petit bijou. On a rarement vu des scènes d'action aussi émouvantes. Et le dernier plan, inexorable comme tout ce qui a précédé, déchire le coeur et s'imprime à l'encre indélébile dans nos yeux. Comme une grosse claque qu'on s'attendait à recevoir mais qui ne fait pas moins mal pour autant. Après cette réussite Oliver Stone, prochain cinéaste à parler du mardi noir, a intérêt à livrer une copie sans défaut.
8/10

Laissez le premier commentaire sur “VOL 93”

 
"Bienvenue au royaume du pisse-froid inculte qui est au cinéma ce que Philippe Manoeuvre est au rock" (© Trollman)
© 2009 TOUJOURS RAISON.. Tous droits réservés
Design by psdvibe | Bloggerized By LawnyDesignz